La communauté française en Hongrie commence à perdre patience. Le gouvernement de Viktor Orban multiplie les lois controversées aux accents nationalistes et semble faire tout son possible pour réduire la présence des entreprises étrangères. Au risque d’oublier les règles européennes de libre concurrence. Un premier "plan de protection du pays" a instauré des "taxes de crise" frappant certains secteurs comme l’énergie, la grande distribution ou les banques. Or ces secteurs sont ceux qui comptent le plus d’entreprises étrangères.
En première ligne : la France avec des groupes comme EDF, Auchan, Suez et Veolia. Des lois spéciales ont également été votées, notamment concernant les tickets restaurant, un secteur trusté par les Français Sodexho, Accor et Chèque déjeuner. Or, depuis le 1er janvier, une loi a fait du ticket repas un monopole d’Etat.
La manière forte parfois employée
Marta Naguy, qui gère la filiale de Chèque Déjeuner en Hongrie, a raconté à Europe 1 qu’elle n’a rien vu venir. "Nous apprenons le 19 novembre que notre activité est mise en danger, qu’à partir de janvier il n’y aura qu’une seule société d’Etat qui aura le droit d’émettre des titres", explique-t-elle. Pour elle, l’objectif de l’Etat hongrois est clair : il s’agit de "monopoliser des activités qui jusqu’ici étaient détenues par des entreprises françaises, allemandes ou anglaises".
"Comment sauver les emplois dans la société ?" :
La manière forte est parfois employée : la ville de Pécs a décidé, du jour au lendemain, que le centre de traitement des eaux ne serait plus géré par le groupe français Suez. Un matin, tout a donc été bouclé et une entreprise locale s’est installée, avec l’aide de vigiles.
"On cherche toujours des boucs émissaires"
Le gouvernement hongrois met donc en avant un patriotisme économique poussé à l’extrême. Son argument : les sociétés étrangères viennent voler des marchés aux Hongrois pour rapatrier ensuite leurs bénéfices en dehors du pays. Dans les milieux économiques, même hongrois, cette idée a bien du mal à passer. "Cela n’a aucun sens", s’est indigné au micro d’Europe 1 l’économiste Andrach Vértech. " En période de crise, on cherche toujours des boucs émissaires", note-t-il, affirmant qu’au contraire, "la Hongrie a besoin des investisseurs étrangers". "Il faut garder ceux qui sont là et en attirer de nouveaux, sans cela le pays ne pourra pas se moderniser".
Les dossiers s’accumulent à Bruxelles, mais ces recours juridiques complexes prennent beaucoup de temps. En attendant, la France a nommé des médiateurs qui ont parfois obtenu quelques résultats. Prudent, le secrétaire d’Etat français au commerce extérieur, Pierre Lellouche, a préféré remettre à plus tard une visite prévue en Hongrie, dans l’attente d’une décision de l’Union européenne sur la constitution hongroise.