Les Québécois, les Marocains et les Maliens peuvent-ils enrichir la France ? Oui, selon un rapport de Jacques Attali, rendu mardi au président de la République. L'Office international du français (OIF) estime le nombre actuel de francophones à travers le monde à 230 millions, un chiffre en baisse. Problème, la France a tendance à sous-estimer l'importance économique de la francophonie. Attali préconise donc de développer une politique volontaire pour profiter du "gigantesque potentiel" que représente cette population, au risque "de sortir du jeu de l'économie mondiale".
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Appliquer la "théorie économique des langues". Jusqu'à aujourd'hui, partager le même idiome a surtout été l'occasion pour la France de développer des liens culturels. Ors, des théoriciens ont démontré que "le partage par les populations de plusieurs pays d’une même langue augmente leurs échanges et leur croissance". Deux pays qui ont des liens linguistiques échangent en effet 65% plus que s'ils n'en avaient pas.
À l'inverse, la barrière de la langue est un frein au commerce, surtout concernant les échanges de services ou de biens complexes à forte valeur ajoutée.
Aujourd'hui, l'économie mondiale s'organise en partie en espaces linguistiques : le monde lusophone (Portugal, Brésil, Angola et Mozambique), le monde arabophone et le monde hispanophone. Jacques Attali souhaite donc que la France applique à son tour la "théorie économique des langues".
Beaucoup de richesses aujourd'hui. Aujourd'hui, les 37 pays francophones ne représentent que 7% de la population mondiale mais produisent 8,5% du PIB mondial et exportent 11% du total des biens et services.
La francophonie est déjà un facteur de croissance, selon le rapport. Les entreprises mondiales françaises s'implantent plus facilement là où la population locale parle le français. Quand ce n'est pas le cas, certaines comme Renault, Air France ou PSA forment leurs personnels étrangers à l'apprentissage du français.
Hollande aux 7ème Jeux de la Francophonie, à Nice en 2013.
Encore plus de richesses à l'avenir ? Oui, si la France décide de mener une politique active en direction des pays francophones et francophiles. Et il y a beaucoup à en tirer : "créer ou maintenir 360.000 emplois et bien plus -autour de un million en 2050- dans les décennies suivantes".
Attali, dans le scénario le plus optimiste, envisage en 2050, une population mondiale francophone de 770 millions de personnes. Cette population en croissance serait "une chance pour l'économie française" qui "pourrait alors être en capacité de maintenir sa part de marché en Afrique et ainsi tirer profit de la croissance de ce continent".
Lycées privés français, Netflix francophone et "label origine France garantie". Jacques Attali propose de viser 7 secteurs clefs pour booster l'économie francophone : tourisme, numérique, santé, recherche, finances, infrastructures et mines.
Le domaine éducatif et culturel doit aussi être développé avec la création d'un réseau privé d'écoles françaises, d'un "Netflix francophone" faisant la promotion des séries et films français et le développement du label "origine France garantie" qui existe déjà depuis 2010.
C'est quoi la francophonie ? Le rapport rappelle que le français a "une place de choix" dans le paysage linguistique mondial. Notre langue est implantée sur les cinq continents et elle est une des rares langues à être enseignée dans tous les systèmes scolaires et universitaires. Ainsi, aujourd'hui, un million d'Indiens apprennent le français ainsi que 100.000 Chinois.
Mais le gros des troupes est évidemment constitué par 37 pays francophones, dont 31 l'ont pour langue officielle (surtout des pays africains). La France peut aussi envisager de développer ses liens économiques avec 41 pays dits "francophiles" (où moins de 20% de la population parle français), situés surtout en Europe et en Amérique du nord.
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