Alléger les nombreuses garanties demandées aux nouveaux locataires et assurer à tous les propriétaires d'être payés. Sur le papier, la Garantie universelle des loyers (GUL) a tout pour séduire. Mais cette disposition, l'une des mesures phare du projet de loi Duflot examiné à partir de mardi à l'Assemblée, suscite de vives critiques aussi bien de la part du secteur de l'immobilier qu'au sein même de la majorité.
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La garantie universelle, c'est quoi ? C'est une garantie publique et obligatoire qui doit accompagner tous les contrats de bail pour protéger les propriétaires des impayés et se substituer à la caution. Celle-ci, principalement sa non-restitution, représente actuellement la principale source de conflit entre locataires et bailleurs. Le nouveau dispositif doit entrer en vigueur le 1er janvier 2016. Son financement doit être assuré à parité par les locataires et les propriétaires via une cotisation de 1 à 2% sur le loyer.
La profession vent debout. Denys Brunel, président de La Chambre des propriétaires, voit dans ce dispositif "une punition contre les investisseurs", au lieu d'une incitation à investir et à louer, écrit-il dans deux tribunes publiées mardi et fin juin dans Les Echos."Concrètement, qui va supporter la mesure si ce n'est, in fine, les propriétaires ?", interroge-t-il, dénonçant "une véritable taxe nouvelle pour le propriétaire, dont le taux ne pourra qu'évoluer de manière exponentielle". "Le danger qui se profile en effet est de voir exploser les impayés au point de rendre insupportable le financement de la garantie". Denys Brunel met en garde sur les conséquences de cette mesure pour le marché immobilier : " Comment inciter un locataire malhonnête à payer son loyer lorsqu'il sait qu'il ne se fera jamais expulser ? Comment ne pas détourner les propriétaires de la location dans ces conditions ?"
Les associations veulent accélérer. Les associations contre le mal-logement demandaient, elles, cette garantie universelle. Mais du côté de la Fondation Abbé Pierre, c'est la date d'entrée en vigueur, le 1er janvier 2016, qui pose problème : "qu'est-ce qu'on fait en attendant?", demande Christophe Robert, délégué général adjoint de la fondation.
L'Assemblée divisée. La ministre du Logement devra batailler pour défendre son projet de loi devant des députés divisés. A droite, on craint que une nouvelle mesure dissuasive pour les propriétaires, aggravant la pénurie de logements. Plus nuancé, le président de l'UDI, Jean-Louis Borloo, ancien ministre du Logement, juge que ce dispositif "n'est pas abouti". Il faut "qu'il y ait l'obligation, quand le locataire est de mauvaise foi, de poursuivre (en justice, ndlr), sinon on va être dans une déresponsabilisation totale", a-t-il plaidé. Le Front de gauche demande, lui, des précisions sur le fonctionnement du GUL.
Quant au PS, il est lui-même partagé. Le député socialiste de Paris, Christophe Caresche, s'oppose ainsi à une mesure qu'il juge trop risquée pour les finances publiques : "L'Etat va prendre à sa charge 100% du risque d'impayés de loyers", explique-t-il au micro d'Europe 1. "Je considère qu'il y a des incertitudes fortes sur ce risque qui sont liées à la conjoncture économique et à "l'aléa moral", c'est-à-dire la déresponsabilisation qui peut résulter de cette garantie universelle des loyers." Christophe Caresche craint qu'en cas de recrudescence des impayés, l'Etat fasse appel au contribuable. "Je vais aller plus loin", poursuit-il. "L'Etat n'est pas fait pour gérer le risque d'impayés de loyer. Ce n'est pas son métier. C'est le métier des assureurs."
>> Cette mesure est loin de régler tous les problèmes. Pour notre éditorialiste Axel de Tarlé, le gouvernement fait même "la promotion des loyers gratuits" :