Menacés par une hausse de la fiscalité sur la bière, les brasseurs ont décidé de lancer la contre-attaque. A l’image de la campagne médiatique des "Pigeons", ces patrons s’opposant à une nouvelle taxe sur les cessions d’entreprises, les brasseurs a décidé de communiquer en mode 2.0. Exit les communiqués de presse indignés, place désormais à une communication débridée axée sur les réseaux sociaux.
QUEL EST LE PROJET DU GOUVERNEMENT ? Dans le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2013, ce dernier veut relever le niveau de fiscalité sur les bières, ce qui rapportera 480 millions d'euros à la Sécurité sociale. Selon le projet, cette augmentation se traduira par une "hausse équivalente à 5 centimes sur un demi de bière", vendu souvent entre 2,50 et 3 euros.
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COMMENT RÉAGISSENT LES BRASSEURS ? Mal évidemment. A leurs yeux, une telle taxe serait une "catastrophe pour la filière" : "la bière ne peut pas boucher le trou de la Sécu à elle toute seule (...), on est complètement stupéfaits par l'ampleur des taxes, c'est un bouleversement", ont-ils prévenu.
COMMENT FONT-ILS POUR MIEUX SE FAIRE ENTENDRE ? En en investissant les réseaux sociaux : les brasseurs de France ont ainsi créé un compte Facebook, un autre sur Twitter et enfin un Tumblr. Dans les faits, cela donne des messages et des photomontages au ton souvent décalé qui ont déjà permis de recueillir presque 6.000 mentions "J’aime" sur Facebook en l’espace d’une semaine. Dans le détail, les brasseurs ont suivi les préceptes de la communication 2.0 sur les réseaux sociaux, à savoir :
- Détourner des slogans connus. La page Facebook s’intitule "La dernière gorgée de bière", en référence au livre de Philippe Delerm, La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules. Autre slogan qui revient au fil des messages : "A consommer ET TAXER avec modération", en référence au message sanitaire qui figure sur toute bouteille d’alcool.
- Adopter un ton décontracté, à l’image du slogan de cette campagne : "Rejoignez-nous pour mettre la pression". Autre indice, les messages postés par l’administrateur du compte Facebook sont presque systématiquement accompagnés d’un Emoticône, ces combinaisons de caractères typographiques qui forment un visage heureux, triste ou surpris.
- Multiplier les photomontages. Une bonne image ou un détournement réussi vaut tous les discours du monde.
- Faire des liens vers les articles de presse qui parlent de vous et qui montrent que le sujet est d’actualité.
- Créer un logo qui permet de créer un visuel identifiable par tous. Alors que les "Pigeons" ont détourné le logo des hackers d’Anonymous, celui des brasseurs se veut limpide : un verre de bière ébréché accompagné du slogan "La dernière gorgée de bière ?".
- Multiplier les illustrations locales afin de montrer que la mobilisation ne se limite pas à quelques régions. Ainsi, les bars et autres cafés envoient des photographies de leur établissement orné d’un seul et même slogan : "+160% de taxes sur la bière. Qui va trinquer ?".
POURQUOI PASSER PAR LES RÉSEAUX SOCIAUX ? "Les marques qui réussissent sont celles qui racontent une belle histoire et c'est dur d'en raconter une sur un site classique", décrypte pour Europe1.fr Julien Hatton, directeur de Buzznative, agence de communication spécialisée dans le marketing viral.
"Facebook permet ainsi de modifier l'angle de discussion : publier des contenus décalés permet de se faire entendre et que les gens les partagent. Ces derniers acceptent beaucoup plus de réagir et de participer que sur un site institutionnel", poursuit-il, avant de conclure : "les réseaux sociaux permettent de créer des communautés pour des causes, les marques ou les lobbies utilisent donc la puissance de ce média".
ET CELA MARCHE ? Pas toujours, mais cela permet de mieux se faire entendre et de populariser une cause. La page Facebook des Pigeons a cumulé 42.000 soutiens en l’espace de quatre jours, ce qui a permis de montrer que leur cause était partagée par un grand nombre d’Internautes. Résultat, un énorme buzz médiatique et un gouvernement qui fait marche arrière.
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Autre exemple, le combat des nostalgiques de la carte SNCF 12-30. Si ces derniers n’ont pas été entièrement entendus, la carte 12-25 n’étant étendue que jusqu’à 27 ans, les fondateurs du mouvement ont été contactés par la SNCF et l’ont rencontrée pour exposer leurs griefs.
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