Sitôt connu le lauréat 2014 du prix Nobel d'économie, décerné au Français Jean Tirole, Manuel Valls puis François Hollande se sont réjouis, le Premier ministre saluant même "un pied-de-nez au French bashing". Mais de son côté, l'économiste de l'université de Toulouse a plutôt donné quelques leçons à l'exécutif. Pour Jean Tirole, la France doit mettre en œuvre des réformes "assez vite", notamment pour réformer un marché de l'emploi qu'il juge "assez catastrophique". "Je pense qu'il va falloir changer les choses si on veut donner un avenir à nos enfants", a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse à Toulouse, lundi après-midi.
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"A force de trop protéger les salariés, on ne les protège plus du tout". "Je ne pense pas que l'économie française est un cas désespéré car on a quand même beaucoup d'atouts", a concédé Jean Tirole, citant les "grandes entreprises qui marchent bien" ou encore le "capital humain". Mais pour le chercheur, il y a urgence à réformer le marché du travail. "Depuis 30 ans, 40 ans, il y a du chômage et les jeunes, on leur propose des CDD dans leur très grande majorité parce que les entreprises ont trop peur de donner des CDI. Donc, on a une situation complètement absurde qui est qu'à force de trop protéger les salariés, on ne les protège plus du tout", a expliqué celui qui, dès 2003, avait proposé la création d'un "contrat de travail unique" abolissant la distinction entre CDD et CDI.
"Nos propositions de réformes n'ont pas été adoptées", a regretté Jean Tirole, disant cependant "ne pas penser pas que l'économie française soit un cas désespéré". Pour lui, "la question n'est pas l'austérité, ce sont les réformes qui donnent confiance à l'étranger dans l'avenir de la France".
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Polémique sur l'assurance chômage. "Je lance des idées comme mes collègues, j'espère qu'elles seront utilisées à un moment ou à un autre", a ajouté le lauréat du prix Nobel. Ses déclarations devraient rencontrer un certain écho, en pleine polémique sur une éventuelle réforme de l'assurance chômage. La semaine dernière, Manuel Valls avait plaidé pour un débat sur la durée d'indemnisation des chômeurs. François Hollande l'avait alors recadré, jugeant qu'il y avait "suffisamment de sujets" sur la table pour ne pas en rajouter. Mais dimanche, le ministre de l'Economie Emmanuel Macron relançait le débat, assurant au JDD qu’il n’y avait "pas de tabou, ni de posture" sur le sujet, et provoquant de vives réactions à gauche.
Selon les informations d'Europe 1, cette sortie du locataire de Bercy avait été prévue en amont à l'Elysée. Il n'empêche, l'épisode confirme que la réforme du marché du travail est un sujet délicat à gauche, quoi qu'en dise un prix Nobel.
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