MoryGlobal : 2.150 licenciements annoncés après la liquidation

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avec François Geffrier et AFP , modifié à
Le successeur de Mory Ducros n'a reçu aucune offre de reprise. Plus de 2.000 emplois sont concernés.

L'hémorragie dans le secteur du transport routier se poursuit. MoryGlobal, successeur de Mory Ducros, a été placé mardi en liquidation judiciaire par le tribunal de Bobigny : dans un mois, l'entreprise fermera ses portes. Plusieurs offres de reprise avaient été déposées, mais elles étaient toutes partielles. Aucune offre de reprise de l'ensemble de l'entreprise n'ayant été reçue, suite au placement en redressement judiciaire de MoryGlobal, les juges n'ont pas eu d'autres choix que de prononcer la fermeture définitive. "C'est un jour noir", a commenté le président du tribunal après avoir rendu sa décision, accueillie par des cris et des huées de plusieurs dizaines de salariés rassemblés à l'extérieur.

Mory Global connait le même sort que Mory Ducros. Victime de la concurrence étrangère, le transporteur de colis Mory Ducros a disparu en février 2014 pour renaître sous l'appellation MoryGlobal. L'entreprise est née au prix d'un plan de 2.800 suppressions de postes, présenté par le fonds Arcole industries, son propriétaire et également repreneur. Le transporteur employait encore 2.200 salariés dans 50 agences en France et n'a pas réussi à se relancer car "les financements promis à la création de la société n'ont pas été au rendez-vous", dixit son PDG, Jean-Louis Demeulenaere.

"C'est une histoire qui se termine. Mory avait près de 200 ans", a réagi, ému, le délégué syndical CGT Jean-Claude Hacquard, avant d'ajouter : "c'est un coup de massue pour tous les salariés qui vont perdre leur travail. On ne sait pas comment on va être accompagnés". "On est écoeurés. On a été roulés dans la farine pendant des années", a de son côté accusé Mourad Ben Kraouda, 53 ans, employé par Mory depuis 35 ans.

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A qui la faute ? "C'est une grande catastrophe pour tout le monde et j'espère que la justice fera son devoir et ira chercher ces fonds vautour qui pourrissent la société", a réagi Eric Martin, délégué syndicat CFTC, au micro d'Europe 1. "Tout cela était cautionné à un moment par l'Etat, qui a validé tout cela, et on a financé Arcole à hauteur de 17,5 millions d'euros. Maintenant, que chacun prenne ses responsabilités", a-t-il ajouté.

Car, malgré le soutien financier de l'Etat, Arcole a plusieurs fois été pointé du doigt pour sa gestion de la société. En février, le tribunal de commerce de Pontoise estimait que "l'actionnaire principal a semblé se désintéresser du projet de restructuration de la société MoryGlobal". Le 26 mars, l'Etat a enfoncé le clou en sommant Arcole "d'assumer ses responsabilités d'actionnaire et de contribuer au financement du PSE", accusant le groupe de ne pas avoir "redressé l'entreprise, en dépit du soutien sans précédent apporté par les pouvoirs publics". En l'occurence, un prêt de 17,5 millions d'euros accordé par l'Etat.

De son côté, Arcole accuse la pourtant modérée CFDT d'avoir créé un "climat d'incertitude sociale" préjudiciable à l'entreprise. "Ceux qui présentent Arcole Industries comme le responsable, voire le coupable, idéal, détournent les regards des réelles difficultés auxquelles MoryGlobal a dû faire face", écrit l'actionnaire dans un communiqué. Il y évoque également la "profonde crise structurelle qui frappe le secteur de la messagerie en France depuis de nombreuses années".

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Obtenir le plus d'indemnités, le nouveau combat des salariés. Pour les salariés qui avaient décidé de continuer l'aventure lors du précédent plan social en 2014, c'est donc la désillusion, un sentiment aggravé par l'impression que l'actionnaire n'a rien fait pour redresser l'entreprise. Les 2.150 salariés bientôt au chômage ont donc annoncé la couleur : ils se battront pour obtenir le plus d'indemnités et ne rien laisser à Arcole.

Désormais, "le combat des salariés va se poursuivre" pour obtenir "un PSE (plan de sauvegarde de l'emploi, autrement dit un plan social ndlr) digne de ce nom", c'est-à-dire au moins équivalent à celui de Mory Ducros, a indiqué Michel Ariba, responsable FO. Même son de cloche du côté de la CFTC : "Ce qu'on veut, c'est que les salariés partent avec un minimum de dignité après tout ce qu'on nous a spolié", a déclaré Erci Martin. Avant de se montrer plus menaçant : "on a prouvé depuis plusieurs semaines qu'on était prêt à passer à l'action, à durcir le mouvement. On ne partira pas sans rien".

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