Fin de semaine difficile pour les Bourses du Vieux Continent après une succession de mauvaises nouvelles économiques. Les marchés d’action sont en effet en passe d'enregistrer leurs plus fortes pertes en une semaine depuis novembre dernier, ce qui constitue un nouvel épisode de la crise de la dette dans la zone euro. Grèce, Espagne, G8, euro, etc. : Europe1.fr fait le point sur une crise au long cours.
Quelle est la cause de peur actuelle ? Déjà préoccupés par la crise de la dette dans la zone euro, les marchés ont réagi aux dernières annonces des agences de notations. La note de la dette grecque a en effet été abaissée jeudi soir par l’agence Fitch. Dans la foulée, Moody’s a dégradé la note de 16 banques espagnoles et de quatre région, dont la Catalogne. Après la Grèce, c’est donc l’Espagne qui devient le principal sujet de préoccupation.
Paradoxalement, les Bourses ont bien résisté vendredi et pour cause : "les agences de notation nous ont habitués à ce genre d'annonces. Elles ne surprennent plus le marché et on voit bien qu'il n'y a aucun effet panique ce matin à l'ouverture", a commenté Yves Marçais, de Global Equities. Résultat, les principaux indices européens sont globalement stables vendredi après-midi.
Pourquoi l’Espagne inquiète ? Déjà engagée dans une sévère cure d’austérité, l’Espagne butte sur deux problèmes. Ses régions, plus autonomes qu’en France, sont très endettées et le gouvernement ne peut leur venir en aide. De plus, ses banques subissent le contrecoup de leurs investissements massifs dans l’immobilier. Ce secteur voit les prix s’effondrer, si bien que les créances des banques sont désormais qualifiées de "douteuses" : il est peu probable que les banques récupèrent toutes leurs billes, les marchés anticipent donc une dégradation de leurs bilans financiers. Enfin, une chute de l’Espagne serait bien plus préjudiciable que celle d’Athènes car son économie est bien plus importante que son homologue grec : il s'agit de la 12e puissance économique mondiale qui représente à elle-seule 12,4% du PIB de la zone euro.
Et le malade grec ? La situation en Grèce, où les retraits d’argent s’accélèrent, ne rassure pas, loin de là. Mais une faillite du pays ou sa sortie de la zone euro sont anticipées depuis des mois par les investisseurs, qui ont donc pris leurs précautions et modifié leurs portes-feuilles. Ce n’est donc plus vraiment la Grèce qui inquiète le plus, d’autant que les dirigeants européens commencent à indiquer qu’une sortie de l’euro est envisageable et qu’elle peut être encadrée.
Qu’est-ce que le "bank run", dernier symptôme de la crise ? On désigne par "bank run", littéralement "la ruée bancaire", l’afflux de clients auprès de leur banque pour y retirer leur argent, de crainte que celle-ci fasse faillite et qu’ils perdent leurs économies. Cette ruée a déjà lieu en Grèce et des rumeurs font été d’un syndrome similaire en Espagne. Ce phénomène inquiète parce qu’il s’agit souvent d’une prophétie auto-réalisatrice : plus les gens y croient, plus y vont retirer leur argent, rendant de plus en plus plausible un risque inexistant au début. Un" bank run" est d’autant plus alarmant qu’il montre que les clients ne font plus confiance à leur banque, une notion pourtant à la base même du système bancaire. Pour l'anecdote, la dernière personne a avoir popularisé cette notion est Eric Cantona, lors de son appel à retirer toutes ses économies.
Comment se portent les bourses européennes sur le moyen terme ? Si les Bourses ont bien amorti le choc vendredi, sur le plus long terme, le bilan est clairement négatif. L’évolution de l’indice de chaque pays est à l’image de l’inquiétude que suscite chaque pays. Depuis le 1er janvier, l’indice grec a chuté de 21,1%, celui de la Bourse espagnole a dévissé de 23% et ceux du Portugal et de l’Italie de 12%. La France s’en sort un peu mieux mais le CAC 40 a tout de même perdu 4,5%. Seule l’Allemagne tire son épingle du jeu, avec un indice DAX en hausse de 7,2% sur la même période.
Quelles solutions à la crise ? Les Européens y travaillent jour après jour et ont déjà élaboré le pacte budgétaire, qui va progressivement s’appliquer à toute la zone euro. Si une telle rigueur est censée permettre des économies, elle freine aussi l’activité. La France milite donc désormais pour ajouter un volet croissance, afin que la zone euro ne s’enfonce pas dans la récession. Mais les marchés, eux, ne raisonnent en ce moment qu’à très court terme : tous ont le regard fixé sur camp David, où se tient ce week-end le sommet du G8.
Peut-on espérer un G8 anticrise ? L'ordre du jour de cette réunion entre les huit plus grandes puissances économiques sera dominé par la crise de la dette en zone euro. Les Etats-Unis en font d’autant plus une priorité qu’ils souhaitent que l’Europe mène une politique de croissance, et non d’austérité qui se traduit aussi pour eux par une baisse de l’activité. Barack Obama pourrait donc défendre la position du président Hollande pour tenter d’infléchir celle de la chancelière Merkel. Reste néanmoins deux bémols : une décision, même d’ampleur, n’aura pas d’effet à court terme, sans oublier que les très sensibles dossiers iranien et syrien sont également à l’ordre du jour.