Rigueur oblige, la chasse aux montages financiers et aux optimisations fiscales est ouverte. Alors que l’Etat cherche par tous les moyens à réduire sa dette et à augmenter ses recettes, l’enquête de France 2 sur EDF fait tache. La chaîne publique révèle que le géant de l’électricité (dont l’Etat est actionnaire à 84%) possédait deux filiales basées dans des pays à l’imposition très favorable : le Luxembourg et l’Irlande, en plus d’être actionnaire d’une société basée aux Bermudes.
Une révélation qui met dans l’embarras le gouvernement, dont le ministre du Budget, Michel Sapin, qui martèle depuis des semaines le même message : "L’optimisation fiscale des entreprises qui trouvent des solutions légales pour ne pas payer des impôts ce n’est pas acceptable, pour personne". L’ex-ministre du Travail a même été interrogé mercredi sur le sujet par un député de l’Assemblée lors des questions au gouvernement.
Qu’est-ce que l’enquête révèle concrètement sur EDF ? Dans le détail, les journalistes de France 2, qui ont disséqué minutieusement le rapport financier de l’entreprise, ont découvert l’existence de deux filiales répertoriées dans le document, mais qui n’apparaissent pas sur la carte du site web de l’entreprise. Pas étonnant puisque ces deux sociétés sont basées en Irlande, connue pour sa politique de dumping fiscal, et au Luxembourg, éclaboussé récemment par l’affaire Luxleaks. Des pays dans lesquelles EDF n’a aucune activité industrielle. Enfin, EDF est actionnaire à 3,8% d’une société basée aux Bermudes, paradis fiscal notoire.
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Que font ces sociétés ? Les trois sociétés, dont la Luxembourgeoise, baptisée Océane Re, ont toutes la même fonction : ce sont des sociétés de "réassurance". Comprenez que lorsqu’EDF signe un contrat d’assurance pour protéger ses centrales nucléaires, cet assureur privé, pour se prémunir du risque, va lui-même prendre une assurance… auprès d’un "réassureur" comme Océane Re. De cette manière, EDF limite le coût des primes qu’il verse aux assureurs, et limite l’imposition sur les bénéfices réalisés par ces sociétés.
Quelle est la perte pour l’Etat ? EDF a joué la transparence après ces révélations, en affirmant avoir payé 6.3 millions d’euros d’impôts pour ses deux sociétés en Irlande et au Luxembourg, et zéro euroaux Bermudes, paradis fiscal. Le groupe rappelle que le chiffre reste dérisoire comparé aux impôts qu’il a payés dans le même temps : 1.5 milliard d’euros d’impôts sur les sociétés et 3,6 milliards pour d’autres impôts.
Il tente de justifier cette délocalisation dans la foulée : "Nous avons un besoin spécifique en matière d'assurance que le groupe ne trouve pas en France. Ces deux pays ont développé des connaissances particulières, facilitées par leur système réglementaire plus souple en matière d'assurance". L’électricien ajoute qu’"il n'y a rien d'illégal. Notre système d'assurance est très réglementé, nous avons ainsi pensé à ce système d'auto assurance qui nous laisserait plus de souplesse". L’embarras est palpable chez EDF, mais aussi à Bercy, qui assure "ne pas avoir de connaissances techniques sur le sujet".