Perte du triple A : c'est pas la note qui compte

La dégradation de la note de la France par l'agence de notation Fitch Ratings vendredi avait un impact quasiment nul lundi matin sur la dette française échangée sur les marchés financiers.
La dégradation de la note de la France par l'agence de notation Fitch Ratings vendredi avait un impact quasiment nul lundi matin sur la dette française échangée sur les marchés financiers. © Reuters
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Fitch a dégradé la note de la dette française. Pourtant, les marchés restent de marbre. Rassurant?

La tendance. Ca ne coûte pas plus cher d'être dégradé, à en croire la réaction des marchés à l'abaissement de la note de la dette française par Fitch vendredi. Malgré cette dégradation, la France continue d'emprunter à bas coût. Le taux d'emprunt de la dette française à 10 ans était ainsi quasi inchangé lundi matin, à environ 2,20% contre 2,19 vendredi. Soit un niveau qui reste proche de ses plus bas historiques (1,7%). Et le gouvernement a de quoi être soulagé, car la charge du remboursement de la dette (46 milliards d'euros en 2012) constitue déjà le deuxième poste de dépenses derrière l’Éducation.

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Que signifie la décision de Fitch ? L'agence de notation a rabaissé la note française de AAA à AA+ vendredi. Il s'agit donc de la dernière des trois grandes agences mondiale à retirer le triple A à l'Hexagone, après Moody's et Standard and Poor's. En théorie, cela est censé signifier que la France est moins capable qu'avant de rembourser sa dette, et alarmer les marchés. En clair, les agences préviennent : attention, investir dans des bons du Trésor français est moins rentable qu'avant.

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Les agences ont-elles vraiment de l'influence ? Fitch explique sa dégradation par les incertitudes qui planent sur les perspectives de croissance française. Or, ces incertitudes sont connues depuis longtemps. De l'avis de beaucoup d'analystes d'ailleurs, les agences publient leur notation beaucoup trop tard. "La dégradation par Fitch ? Complètement hors sujet", déclarait par exemple dimanche le chef économiste d'UniCredit, Erik Nielsen. D'autant que la dégradation par Fitch arrive des mois après celles de ses deux concurrentes Moody's et Standard and Poor's, qui n'avaient déjà pas alarmé les marchés. Sa décision "n'est pas un événement de grande portée, puisqu'elle met Fitch au même niveau que Moody's et Standard and Poor's", soulignent ainsi les économistes de Crédit Agricole CIB. "Ce n'est pas une bonne nouvelle politiquement, mais il y aura peu de réaction du marché", estiment-ils.

Le regard des marchés est ailleurs. En revanche, de nouveaux indicateurs pourraient faire s'envoler les taux d'emprunt. "La situation en Zone euro est pire que prévue car l'activité des pays émergents ralentit. On peut donc s'attendre à une hausse des taux d'intérêt sur la dette française, ce qui fera augmenter les taux d'emprunt à la consommation et à l'immobilier", prédisait ainsi l'économiste Christian Saint-Etienne, contacté par Europe1.fr fin juin.

La réforme des retraites, leur priorité. Le calme des marchés s'explique aussi par la politique de la Banque centrale européenne. En injectant massivement de la monnaie sur les marchés, cette dernière a contribué à maintenir à la baisse les taux d'intérêt. Mais "l'action de la BCE n'est pas une garantie absolue. Les marchés seront très attentifs à la réforme des retraites qui sera menée cet automne", a averti également Christian Saint-Étienne, dimanche dans Le Figaro. "Le gouvernement joue sa crédibilité sur ce dossier. Les marchés […] s'attachent aux réformes structurelles, à celle des retraites en particulier", renchérit Jean-Hervé Lorenzi dans le quotidien. L'été devrait donc échapper à la tempête. Mais les prévisions pour l'automne restent incertaines.