Pourquoi le Royaume-Uni vend-il ses parts dans Eurostar ?

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A SAISIR - Le gouvernement britannique est en passe de vendre les 40% d’Eurostar qu’il détient.

C’est officiel, Eurostar n’est plus une société à dominante franco-britannique. Le gouvernement britannique a annoncé mercredi avoir conclu un accord pour vendre les 40% d’Eurostar qu’il détient. Une opération qui va lui rapporter près d’un milliard d’euros, versés par un fonds d'investissement britannique, Hermes Infrastructure, et la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ). "Il s'agit d'une excellente opération pour les contribuables britanniques qui dépasse nos attentes", a réagi le ministre britannique des Finances, George Osborne. Mais pourquoi le Royaume-Uni a-t-il vendu ses parts dans une société en bonne santé ?

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Car 40% d’Eurostar, cela fait beaucoup d’argent. Initialement, Londres espérait récupérer 412 millions d’euros de cette vente. Finalement, on lui en propose un milliard, si bien que le ministère britannique des Finances n’hésite plus à vendre sa participation. Il faut dire qu’Eurostar a de quoi attirer les investisseurs : la compagnie ferroviaire gagne de l’argent et transporte de plus en plus de voyageurs.

Car le Royaume-Uni veut réduire sa dette. Londres affichait en 2014 une dette publique représentant 88,7% du PIB, un chiffre pas si éloigné de la dette française (95,3%). Sauf que si l’Hexagone est habitué à ce niveau élevé d’endettement, ce n’est pas du tout le cas du Royaume-Uni : le pays a été habitué à rester sous la barre des 50% entre 1995 et 2007. Sa dette a en fait explosé suite à la crise des subprimes, et ce bien plus que chez ses voisins. Le gouvernement a donc érigé sa réduction en priorité nationale, une forme de "retour à la normale" : fin 2014, il annonçait un plan de privatisations de 20 milliards de livres, soit 27,5 milliard d'euros, d’ici 2020. La vente de sa participation dans Eurostar n’est donc qu’une privatisation parmi tant d’autres.

Car le Royaume-Uni n'a pas de champion national dans le ferroviaire. Londres avait d'autant plus intérêt à vendre cette participation que le Royaume-Uni ne dispose pas de champion national dans le domaine ferroviaire. Dans le paysage européen, deux entreprises font figure de poids lourd, la SNCF et l'Allemand Deutsche Bahn. A contrario, le marché ferroviaire britannique est complètement morcelé en une multitude de petits opérateurs qui auront du mal à se lancer à la conquête de l'Europe. Le Royaume-Uni n'avait donc aucun intérêt à conserver cette participation au sein d'Eurostar.

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Car il faut savoir vendre au bon moment. Un dernier élément peut expliquer la volonté de Londres de se séparer de ses participations dans Eurostar : l’ouverture à la concurrence. Depuis 2010, des compagnies ferroviaires peuvent déjà entrer en concurrence avec la SNCF pour les trajets internationaux mais peu ont franchi le pas en raison des investissements que cela représente. Mais ce n’est qu’une question de temps et le principal concurrent de la SNCF au niveau européen, Deutsche Bahn, a annoncé qu’il proposera des liaisons transmanches en 2016 (Cologne-Londres ou encore Amsterdam-Londres). Dans un an, Eurostar ne sera donc plus seul sur ce marché, la fin d’un monopole qui pourrait faire baisser sa valeur. Londres avait donc intérêt à vendre sa participation au moment où la cote d’Eurostar est au plus haut, c’est-à-dire maintenant.

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