La polémique. Le ministre du Travail, François Rebsamen, a provoqué la semaine dernière une double polémique. D’abord en invitant Pôle emploi à mieux contrôler les demandeurs d’emplois, mais aussi et surtout en avançant le chiffre de 350.000 emplois qui ne trouveraient pas preneur. Sauf que la réalité est plus complexe que ce chiffre contesté.
350.000 emplois non pourvus, vraiment ? Alors que François Hollande parlait en 2013 de "200 à 300.000" offres d’emploi à pourvoir, Nicolas Sarkozy faisant en son temps monter les enchères jusqu’à 600.000, François Rebsamen a avancé le chiffre de 350.000. Sauf qu’il ne figure dans aucune statistique officielle : le ministre du Travail l’a calculé en faisant la synthèse de plusieurs études. Mais il est contesté, et pas que par le secrétaire général de la CGT, Thierry Lepaon, qui parle de chiffres "pas sérieux".
D’abord parce que le ministre semble mélanger offres d’emploi vacant, qui viennent d’être publiées et attendent un candidat, et offres d’emploi non pourvues, qui sont supprimées après plusieurs mois de recherches infructueuses. Le magazine Alternatives Economiques s’est penché sur "ces offres d’emploi qui ont été retirées sans donner lieu à un recrutement. Pôle emploi qui collecte, bon an mal an, 3 millions d’offres, évalue à 116.000 le nombre d’offres qui n’ont pas trouvé preneur faute de candidats. Soit 4 % des offres au total". On est loin du chiffre de 350.000 mais cela n’est pas anodin. Seule certitude, entre un quart et un tiers des recrutements sont perçus comme difficiles par les employeurs.
Quels métiers peinent à trouver des travailleurs ? Ils sont nombreux et variés. Les entreprises ont par exemple du mal à trouver des ingénieurs informatiques, des cadres commerciaux ou encore, dans l’industrie mécanique, des ouvriers qualifiés. On manque aussi de candidats dans l’hôtellerie-restauration, l’aide à domicile, les métiers de boucher, boulanger, ou encore de conducteurs de bus ou d’engins de chantiers.
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Pourquoi ces emplois ne trouvent pas preneur ? Deux raisons principales expliquent ces difficultés de recrutement. D’abord, certains postes sont jugés peu attractifs : salaires trop faibles, horaires décalés, peu de possibilités d’évolution. Ensuite, il y a un problème de compétences. C'est en tous cas la raison la plus citée par les employeurs qui ne trouvent pas de candidats adaptés à leurs besoins.
C’est particulièrement le cas dans l’informatique, ou encore pour certains métiers de l’industrie. "Il y a beaucoup de métiers techniques qui demandent un CAP : des carrossiers, des tauliers, des métiers dit manuels mais qui demandent une certaine technicité, une certaine formation. Cela a été complètement délaissé ces 20 dernières années, par des politiques qui sont ce qu’elles sont. En tout cas, le fait est là aujourd’hui : il y a des pénuries dans ces métiers", témoigne Carlos Concalves, cofondateur du site de recherche d’emploi JobInTree.com.
Mais certaines offres d’emplois sont factices. Ces secteurs multiplient donc les offres d’emploi pour des besoins réels. Mais d’autres sollicitent Pôle emploi et alimentent ses statistiques de manière abusive, car parmi ces offres non pourvues se cachent des emplois qui n’ont aucune réalité. Ainsi, certaines entreprises déposent une annonce pour se constituer une base de CV, c'est particulièrement vrai dans les services informatiques.
Pole emploi propose également des offres pour lesquelles le recrutement ne sera effectif… que si l’entreprise remporte un marché ou un appel d’offre. Si ce n'est pas le cas, l'offre disparait. Ces phénomènes existent mais ils sont impossibles à quantifier. Enfin, certaines entreprises trouvent des candidats en dehors de Pôle emploi, mais oublient d’y retirer leur offre d’emploi. Autant de raisons de prendre avec des pincettes ce chiffre de 350.000 emplois non pourvus.
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