Seuls 31 dossiers auraient abouti, contre des milliers prévus initialement. La ministre se défend.
LE CHIFFRE. L'effet d'annonce sur les réquisitions de logements vacants n'a pas été suivi de résultats concrets. Après l'annonce initiale de 70.000 réquisitions en Ile-de-France l'hiver dernier, le ministère du Logement a dû se rendre à l'évidence, les dossiers étaient beaucoup trop lourds, et donc trop longs à gérer en quelques mois. Cécile Duflot a donc revu sa copie et a finalement choisi de cibler uniquement les immeubles où au moins dix appartements étaient vides. Une nouvelle donnée qui a fait chuter le nombre de logements à réquisitionner à 7.500. Un chiffre qui a encore été revu à la baisse après les lettres de réquisition reçues et les modifications apportées par les propriétaires.
Cécile Duflot se défend. Mercredi, sur Europe 1, la ministre du Logement s'est défendue face à ces chiffres."Ce chiffre est caricatural. Notre but, ce n'est pas de réquisitionner pour réquisitionner, mais de faire en sorte que les logements vacants ne le soient plus", a-t-elle expliqué sur Europe 1. Selon elle, la simple menace de réquisition aurait permis de remettre sur le marché des immeubles laissés vacants : "en Île-de-France, nous avons dénombré 70.000 logements vides. 7.500 d'entre eux ont déjà été visés par une procédure. Sur ces logements visés, 75 % ont déjà été remis en location."
Des conseils opportuns. Bérangère Banquey, directrice juridique de la Chambre des propriétaires, confirme à Europe 1 avoir reçu beaucoup d'appels de propriétaires concernés. "Pour retarder la réquisition, nous leur avons conseillé trois choses. Présenter un échéancier de travaux, apporter la preuve de la mise en vente de leur bien, ou alors mettre eux-mêmes leur bien en location, quitte à réduire le prix du loyer", détaille-t-elle. Ces conseils ont porté leurs fruits, puisque trois-quarts des logements inspectés aujourd'hui sont soit en travaux, soit remis en location, annulant de facto la procédure de réquisition. Le but recherché par la ministre est indirectement atteint puisqu'une partie des logements vides revient sur le marché immobilier.
En Ile-de-France, de surprise en surprise. Pourquoi, six mois après l'annonce, aucune réquisition n'a été effectuée ? Le bilan des 5.053 inspections de logements effectuées à ce jour en Ile-de-France permettent d'y voir plus clair : 65% des biens vont être remis en location, 10% sont en travaux, 4,5% étaient démolis, 5% occupés par des commerces ou bureaux, 7,5% sont vétustes. Seuls 8% correspondent aux critères de réquisitions, mais les trois-quarts vont en fait être rachetés par un bailleur social.
Peu de données sur le reste de la France. Selon les rares chiffres de l'administration fiscale disponibles, il y aurait également 24.000 logements disponibles en Provence-Alpes-Côte-d'Azur, 5.667 en Haute-Garonne, dont 4.344 à Toulouse, et... seulement 21 immeubles identifiés en région Rhône-Alpes.
Les mal-logés s'impatientent. Face à des résultats qui se font attendre, le Droit au logement (DAL) réclamait déjà l'accélération des réquisitions. "Ce que nous attendons, c'est que la ministre nous explique pourquoi on a choisi la procédure la moins rapide pour mener les réquisitions (...) Pour nous il faut mener 20.000 réquisitions pour aider les personnes les plus exposées, les plus frappées par la crise", s'emportait sur Europe 1 Jean-Baptiste Eyraud, le président de l'association. Monique, mal-logée de 72 ans originaire des Hauts-de-Seine, attend un logement HLM dans Paris depuis 1996. "Je renouvelle tous les ans le dossier, et il n'y a rien à faire. Rien ne bouge", se désole-t-elle sur Europe 1. "J'ai une petite retraite de 800 euros par mois, je suis handicapée, je fais des comas diabétique", poursuit-elle, jugeant la situation "déplorable".