Le contexte. La CGT a appelé mercredi à une semaine d'action contre la réforme des retraites, du 7 au 11 octobre. La confédération espère encore mobiliser contre un projet rejeté par les Français, mais qui ne suscite pour le moment pas d'explosion sociale d'ampleur. La plupart des syndicats ont d'ailleurs déjà laissé tomber la rue, et espèrent obtenir des avancées par le dialogue. La CGT elle-même a renoncé à demander le retrait de la réforme, et prépare déjà ses amendements pour peser dans le débat parlementaire, comme le raconte ici La Tribune.
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La jeunesse (de gauche) mobilisée. Au milieu de ce contexte social des plus tièdes, les partisans d'une mobilisation forte regardent avec espoir du côté des étudiants. Un collectif de 17 organisations syndicales et politiques (marquées à gauche) s'est formé au début du mois, baptisé "La retraite : une affaire de jeunes". Fer de lance de ce mouvement; l'Unef, principal syndicat étudiant, continue de tenter de mobiliser et multiplie les journées d'action.
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Demandez-vous le retrait de la réforme ? "Il peut-y avoir une réforme, mais pas en l'état. Celle-ci oublie la jeunesse. Une réforme des retraites n'est pas inenvisageable... mais pour donner des droits à la jeunesse, comme la prise en compte des années d'étude ou des années de chômage qui précèdent l'insertion dans le marché du travail. On pourrait, également, imaginer un salaire minimum en fonction de la qualification. Aujourd'hui, un Bac+5 est payé au Smic. Comment voulez-vous financer les retraites avec des salaires si bas ? Tout le monde trouve ça anodin de demander des efforts aux jeunes. Mais quand il s'agit de leur donner des droits, il n'y a personne".
L'allongement de la durée de cotisation semble inévitable. Vous demandez toujours son retrait ? "Oui, car il y a une incohérence. On nous demande de travailler plus longtemps, alors que nous sommes la génération qui s'insère le plus tard dans le marché du travail. Le chômage des jeunes atteint 25%. Alors pourquoi nous demander, à nous, de déjà mettre de l'argent de côté pour nos retraites ? L'allongement de la durée de cotisation ne sera effectif qu'en 2020. Or, personne ne sait dans quel état sera le marché du travail à un horizon aussi lointain. On pourrait attendre avant de sacrifier notre génération… d'autant que si le gouvernement tient ses objectifs, il y aura le plein emploi en 2025. Avec le plein emploi, on n'a pas besoin de travailler 43 ans pour financer nos retraites. On prend des décisions au moment où le marché du travail est au plus mal… "
Ne vous sentez-vous pas isolés ? Les syndicats pourraient bloquer le pays, comme en 1995. Vous ne regrettez pas qu'ils n'en fassent pas plus ? "Les autres syndicats nous écoutent, ils reprennent certaines de nos revendications. Chacun est dans son rôle. Le notre est de défendre la jeunesse. Je ne vais pas leur dire comment mener la mobilisation. J'aurais horreur qu'ils le fassent pour l'Unef. En revanche, je suis surpris de devoir faire tout ce travail face au gouvernement. Un gouvernement qui, je le rappelle, avait fait de la jeunesse sa priorité. "
Vous y croyez encore ? Pensez-vous vraiment pouvoir faire reculer le gouvernement ? "Le gouvernement ou sa majorité parlementaire. Je ne veux pas croire que cette majorité, de gauche, assume de voter en l'état une telle réforme. Nous allons pousser les députés à déposer des amendements, pour que l'allongement de la durée de cotisation ne soit pas gravé dans le marbre, pour que les études et la période d'insertion au marché du travail soient davantage pris en compte."
Et si vous n'êtes pas entendus, jusqu'ou iriez-vous ? On sait que vous êtes capables de perturber, voire bloquer le fonctionnement de l'Université… "Nous ne sommes pas dans la posture. On veut être entendu. Nous fonctionnons par étapes : d'abord on s'invite dans le débat (ce qui est désormais fait). Puis, on essaie de peser auprès des parlementaires. Ensuite, on ne sait pas, à l'heure actuelle, jusqu'ou ça peut aller… Ce qui est sûr, c'est qu'on ne va pas partir du principe que l'on a déjà perdu. "