Ségolène Royal semble déterminée à faire contribuer les sociétés d'autoroutes à la solidarité nationale. La ministre de l'Ecologie souhaite en effet une baisse de 10% des tarifs autoroutiers, et même "une gratuité, par exemple, le week-end", a-t-elle déclaré mardi. "Tout ça est à discuter" lors de négociations à venir entre le gouvernement et les sociétés autoroutières, a-t-elle indiqué sur RTL.
Moins 10% sur les tarifs… "Il y a 20% de tarif en trop, puisque quand une autoroute fait payer 100 euros, il y a 20 euros de trop qui sont empochés. Ce que je souhaite, c'est qu'il y ait baisse des tarifs autoroutes de 10%, avec une gratuité par exemple le week-end. Tout ça est à discuter", a renchéri la ministre, qui s'appuie sur un rapport de l'Autorité de la concurrence présenté mi-décembre.
Ce document accuse en effet les sept sociétés concessionnaires d'autoroutes, contrôlées par les groupes français Vinci et Eiffage et espagnol Abertis, d'afficher "une rentabilité nette exceptionnelle, comprise entre 20% et 24%, nourrie par l'augmentation continue des tarifs des péages". "Et cette rentabilité n'apparaît justifiée ni par leurs coûts ni par les risques auxquels elles sont exposées", ajoute ce rapport commandé par la Commission des Finances de l'Assemblée nationale.
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"Souvent, je leur ai dit pourquoi vous ne faites pas au moins les autoroutes gratuites le week-end, par exemple, ou aux heures de pointes. Ca serait leur devoir", assène Ségolène Royal mardi.
… Et 10% pour remplacer l'écotaxe. La ministre veut donc réserver 10% des bénéfices des autoroutes aux automobilistes. Quant aux "10% restants", la ministre souhaite que "ça vienne financer le fonds d'investissement sur les infrastructures" routières. Après la suspension jeudi dernier du dispositif d'écotaxe sur les poids lourds, Ségolène Royal a en effet indiqué vouloir compenser le manque à gagner en prélevant les profits des autoroutes.
"Les autoroutes n'ont pas respecté le contrat qui était le leur, c'est-à-dire qu'elles auraient dû baisser les prix au fur et à mesure de la durée d'amortissement des autoroutes. Donc, les Français ont payé deux fois, lors de la construction et quand le gouvernement Raffarin-Villepin a privatisé les autoroutes", a martelé Ségolène Royal. Pour la ministre, les négociations qui vont s'ouvrir visent à ce que "les autoroutes rendent cet argent pour pouvoir faire les travaux d'infrastructures".
Quelle marge de manœuvre a-t-elle ? En théorie, les contrats passés entre l'Etat et les sociétés d'autoroutes excluent toute modification des tarifs ou de la répartition des bénéfices avant 2027 minimum. Ultra-solides juridiquement, ces contrats ne peuvent pas être amendés, sous peine d'être sanctionné par le Conseil d'Etat.
Mais comme l'explique l'Autorité de la concurrence, il reste une fenêtre de tir : renégocier le "plan autoroutier". Signé en 2012 par les représentants de l'Etat, ce dernier prévoit l'allongement de la durée des concessions (jusqu'à six ans de plus) en échange de 3,6 milliards d'euros d'investissement de la part des sociétés exploitantes. Or, ce plan n'a pas encore été validé par la Commission européenne et peut donc être renégocié. Les mesures proposées par Ségolène Royal pourraient donc être glissées dans ce cadre là. Ce serait du donnant-donnant : en échange d'un allongement des concessions, les sociétés d'autoroutes participeraient un peu plus au redressement du pays.