La promesse. "J'imposerai aux dirigeants des entreprises publiques un écart maximal de rémunérations de 1 à 20", promettait le candidat socialiste, François Hollande, pendant la campagne présidentielle. Un an après, comme le révèle l'enquête d'Europe 1, cette promesse est bien tenue... mais ne dépasse pas d'un millimètre le cadre des entreprises où l’État est actionnaire majoritaire.
450.000, pas un centime de moins. Une fois au pouvoir, le gouvernement de gauche a retenu le plafond de 450.000 euros bruts à ne pas dépasser dans l'année. Bercy a pris pour base de calcul la moyenne des 10 % des plus bas salaires dans l'ensemble des quatorze principales entreprises publiques. Après juillet et la publication d'un décret, les rémunérations des patrons ont donc dégonflé d'un coup là ou l'état est actionnaire majoritaire. Les salaires se retrouvent pile sur la barre des 450 000 euros, pas un centime de plus, mais pas un centime de moins non plus !
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A la Poste, le salaire de Jean-Claude Bailly, le PDG, est ainsi passé de 635.000 euros à 450.000. Idem à Aéroport de Paris. Luc Oursel, président du directoire d'Areva, a lui perdu 130.000 euros. Mais c'est Henri Proglio, le patron d'EDF, qui a le plus perdu : sa rémunération est passée d'1,5 millions à 450.000.
Les filiales aussi concernées… Certains ont cru qu'ils n'étaient pas concernés par le décret de juillet, qui ne citait pas les "filiales" des entreprises publiques. Ainsi, le conseil d'administration de La Banque postale, filiale de la Poste, avait maintenu le salaire de 833.217 euros de son président Philippe Wahl. Mais la publication d'un nouveau décret en octobre l'a conduit à raboter son salaire de près de 50%. En tout, 45 entreprises sont tenues de serrer la vis des rémunérations depuis octobre.
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… mais aucune autre entreprise. Contrairement à ce que le gouvernement espérait, la tendance n'a pas inspiré les autres groupes du Cac 40, même là où l'état est actionnaire minoritaire. Ainsi chez GDF-Suez, France télécom ou encore Renault, les rémunérations dépassent toujours le million d'euros annuel. Seul le Patron d'Air France "concède" un petit effort : Alexandre de Juniac a baissé de 50% une partie de sa rémunération variable et devrait toucher 900.000 euros en 2013. Ce qui est loin de suffire aux syndicats.
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"Chez Air France, le patron gagne 40 fois plus que les bas salaires. S'il ne veut pas baisser le sien, pourquoi ne pas augmenter ceux du reste des salariés pour arriver à l'échelle de 1 à 20", demande ainsi David Ricatte, de la CGT Air France, au micro d'Europe1. "Ancienneté ? Compétence ? On ne sait pas à quoi correspond le salaire de notre patron, sur quelle base il gagne 900.000 euros", renchérit-il. "Ils nous disent de nous serrer la ceinture, mais eux ne le font pas, et portent visiblement des bretelles", conclut le syndicaliste.
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Du changement cet été ? Ces montants faramineux n'évolueront pas "tant que les rémunérations sont décidées dans les conseils d'administration", assure, de son côté, Pierre Henry Leroy, président de Proxinvest, cabinet d'analyse financière. "On est dans un système dans lequel on est entre copains. On ne va pas faire venir un administrateur qui va déplaire au président" et baisser sa rémunération, détaille-t-il au micro d'Europe1. L'une des solutions pour limiter les dérapages serait donc de faire voter tous les actionnaires, même les petits porteurs, qui sont présents lors des Assemblées Générales. La porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, a promis une loi en ce sens pour cet été.
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