Sécu : l'ombre du travail au noir

Le gouvernement a présenté lundi l'addition pour le budget de la Sécurité sociale, dont le déficit doit baisser en 2013 à 11,4 milliards.
Le gouvernement a présenté lundi l'addition pour le budget de la Sécurité sociale, dont le déficit doit baisser en 2013 à 11,4 milliards. © Francois Lafite/Wostok Press/Maxppp Franc
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Auto-entrepreneurs et entreprises de services à domicile sont contre. Le gouvernement répond.

Ils n'ont pas le même statut mais ils partagent la même colère. Entreprises de services à la personne et auto-entrepreneurs ont entamé un rude combat contre le gouvernement, depuis qu'il a annoncé lundi son plan de lutte contre le trou de la Sécu pour l'an prochain.

Au cœur de leurs critiques : deux mesures, comprises dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2013, dit PLFSS 2013 ou Budget de la Sécu 2013 pour les intimes. Ces réformes sont accusées par leurs détracteurs de favoriser le travail au noir, et d'aboutir ainsi à l'inverse de leur objectif : renflouer les comptes publics.

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TRAVAIL À DOMICILE

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La mesure qui fait polémique. La première mesure controversée est celle consistant à revoir le calcul des cotisations sociales des employeurs, dans le secteur des services à la personne. Actuellement, pour payer leurs cotisations, les particuliers ont le choix entre une déclaration au salaire réel et une déclaration au forfait sur la base du Smic (1.425,67 euros). Mais le forfait "minore les droits des salariés et limite les recettes fiscales", a estimé le gouvernement. Il a donc décidé de le supprimer.

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Pourquoi l'ombre du travail au noir plane. "Nous ne sommes pas catastrophés, nous sommes atterrés. En moyenne, chaque employeur va devoir payer entre 3 et 5 euros de l'heure pour payer une aide ménagère, et plus de 7 euros pour les cours particuliers", affirme Maxime Aiach, président de la Fédération du service au particulier (FDSP), contacté par Europe1.fr  Conséquence :"c'est un immense plan social qui se prépare."

Selon son organisation, les employeurs vont cesser d'employer légalement, puisque embaucher des travailleurs clandestins deviendra bien plus avantageux. Aujourd'hui, estime la FSDP, 70% des travailleurs à domicile officient déjà au noir, soit plus de 6 millions de personnes.

Et les nouvelles mesures ne vont faire qu'aggraver la donne. "Ces cinq dernières années, avec des mesures incitatives, notre secteur a déplacé 400.000 emplois du travail au noir vers de vrais emplois. Avec cette mesure, ce sera le chemin inverse. Ce n'est pas une crainte, c'est certain. C'est ce qui va se passer", insiste Maxime Aiach, qui pointe également le manque de contrôle. "Est-ce que vous avez déjà vu un fonctionnaire de l'Ursaff se rendre chez un particulier pour voir si sa femme de ménage est embauchée en règle?"

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© EUROPE 1

La réponse du gouvernement. L'exécutif essaie de rassurer, en rappelant que les avantages fiscaux pour les employeurs sont maintenus. "Les exonérations fiscales font que le travail au noir ne deviendra pas plus intéressant que le légal", a assuré la ministre de la Santé et des Affaires sociales Marisol Touraine, au micro d'Europe1.

Et l'exécutif  tente, surtout, de convaincre de la nécessité de la mesure. L'Etat table en effet sur 340 millions d'euros de recettes en 2013 pour la Sécurité sociale, ainsi que 135 millions d'euros pour les autres régimes sociaux (assurance chômage et retraites complémentaires).

La réplique des détracteurs. "C'est de la méconnaissance totale, rétorque le président de la FDSP. Les exonérations fiscales ne suffisent pas. Or si les emplois passent du cadre légal au noir, cela fait des salariés en moins qui cotisent. Selon une enquête du journal El Pais, le budget de l'Espagne, qui avait une fiscalité comparable, enregistre un manque à gagner de 85 millions par an depuis que l’État est revenu dessus."

AUTO-ENTREPRENEURS

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La mesure qui fait polémique. Le gouvernement prévoit un alignement du régime de cotisation sociale des auto-entrepreneurs sur celui des travailleurs indépendants. "Nous avons uniquement décidé de relever les taux forfaitaires pour les rapprocher de ceux des indépendants. C'est une question d'équité", explique-t-on au ministère du Commerce et de l'Artisanat.

Pourquoi l'ombre du travail au noir plane. La Fédération des auto-entrepreneurs (FEDAE), par exemple, est alarmiste: "le régime sera tué", s'est-elle emportée vendredi. L'organisation a lancé une pétition sur son site Internet auprès de ses adhérents pour que le dispositif prévu soit révoqué.

Selon elle, la situation de nombre d'auto-entrepreneurs est déjà périlleuse. Et une hausse des charges conduira à plus d'illégalité, sauf à risquer de mettre la clé sous la porte.

"C'est une mise à mort progressive des auto-entrepreneurs. On se dirige vers une recrudescence du travail au noir!, martèle également le fondateur du statut, l'ancien secrétaire d'Etat aux Entreprises, Hervé Novelli, contacté par le site spécialisé JeanMarc-sylvestre.com. Ceux qui travaillaient au noir avant l’auto-entreprise vont refaire du noir. C'est une véritable agression contre les travailleurs pauvres." "Vous êtes en train de tuer la croissance française ! Quand il n’y aura plus d’entrepreneurs dans ce pays et que l’on restera avec la fonction publique… Il faudra la financer mais plus personne ne sera là pour le faire. Reprenez vos esprits", s'insurge Hervé Novelli.

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La réponse du gouvernement. Là encore, l'exécutif tente de minimiser et assure que le Budget Sécu 2013 ne prépare pas une révolution. "Concrètement, les taux de cotisation devraient être relevés de 2 ou 3 points. Le reste (avantages fiscaux, démarches simplifiées) ne varie pas. Si les auto-entrepreneurs gagnent zéro, ils continueront de payer zéro", détaille-t-on au ministère du Commerce et de l'Artisanat. Or la révision du dispositif rapporterait 130 millions aux caisses de la Sécu, selon le gouvernement.

La réplique des détracteurs.. Les défenseurs les plus ardents du statut estiment qu'une simple hausse de quelques points de cotisation serait fatale. Mais d'autres représentants ont néanmoins relativisé la portée de la réforme. Pour le président de l'Union des auto-entrepreneurs (UAE), François Hurel, il faut "regarder plus attentivement le projet". Selon lui, "il n'est pas illogique qu'on demande aux auto-entrepreneurs des efforts partagés par tout le pays. Si on leur demande des efforts, c'est d'ailleurs qu'on les reconnaît ".