Vous n’en avez probablement pas encore entendu parler, et pourtant c’est l’une des entreprises françaises les plus prometteuses. La société Sigfox a levé mercredi 100 millions d'euros et ce n’est probablement qu’un début, cette entreprise étant pionnière sur un secteur balbutiant : les réseaux de télécommunication bas débit permettant de connecter les objets à l'internet. La preuve que la French Tech n’est pas qu’un slogan.
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Sigfox, la start-up qui monte, qui monte. Créée à Toulouse en 2010, l’entreprise compte aujourd'hui quelque 80 collaborateurs. Et elle compte utiliser les 100 millions d’euros récoltés pour renforcer rapidement ses équipes techniques et commerciales et muscler sa recherche et développement. Mais pourquoi parler de cette entreprise en particulier ? D’abord parce qu’en levant 115 millions de dollars, elle a égalé le record pour une start-up française établi par le site de musique en ligne Deezer. Et encore, les investisseurs proposaient carrément de mettre sur la table 130 millions d’euros, ce que Sigfox a refusé.
Le profil des investisseurs est un autre signe que la start-up est promis à un bel avenir : des opérateurs télécoms (Telefónica, SK Telecom et NTT Docomo Ventures), le fonds d'investissements Elliott Management Corporation et les groupes industriels GDF SUEZ, Air Liquide et Eutelsat. Sans oublier BPI France, le bras armé de l'État pour investir.
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Sa spécialité : faciliter le dialogue entre objets connectés. La jeune société déploie des réseaux de télécommunication bas débit permettant de connecter les objets à l'internet. Ces réseaux ne transmettent pas de la voix, mais des signaux élémentaires comme un relevé de compteur ou un signal de panne. Sigfox a la particularité d’offrir une solution économe aux objets connectés pour qu’ils échangent des informations sans passer par le réseau internet classique, dont le déploiement coûte cher. L’entreprise assure que sa technologie coûte en moyenne 1 euro par an et par objet connecté.
Pour y arriver, elle a déployé un réseau d’antennes relais en France, au Royaume-Uni ou encore en Espagne mais elles n’ont rien à avoir avec celles des opérateurs téléphoniques : ces antennes relais font 20 cm à 30 cm de haut pour 1 cm de diamètre et utilisent des ondes de très, très faibles intensité sur des fréquences que personne n’utilisait. Une technologie qui permet de réduire drastiquement les besoins en énergie des objets connectés lorsqu’ils transmettent des informations. A terme, les puces embarquées dans ces objets pourraient même se passer de batteries.
Concrètement, ça sert à quoi ? Les applications sont nombreuses et ce n’est qu’un début. Suivi médical de patients à distance, compteur intelligent d’eau ou d’électricité, climatisation, détecteur d’intrusion font partie des technologies les plus connues. Mais l’internet des objets connectés, c’est aussi la "ville intelligente", qui repose sur un contrôle à distance des infrastructures (collecteurs de déchets, transports en public) et des équipements urbains (éclairage public, feux de signalisation, parcmètres). Sans oublier le tracking, le suivi géolocalisé de bien, qui permet à une entreprise de suivre les déplacements de palettes de marchandises par exemple. Cette technologie peut également permettre à un appareil ménager (frigidaire, cafetière) de commander automatiquement les aliments qui vont bientôt manquer, ou encore à un agriculteur d’être alerté que l’eau vient à manquer dans un de ses champs.
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Un futur leader mondial ? Les esprits grincheux rappelleront que de tels objets existent déjà, ce qui est vrai. Mais ils communiquent actuellement via Internet ou le réseau téléphonique, ce qui coûte cher et n’est pas possible partout. En utilisant un réseau dédié que déploie actuellement Sigfox, l’objectif est de réduire considérablement les coûts et de favoriser le développement de cette technologie.
Or, l’entreprise française est la première à avoir mis au point un tel réseau et l’a déjà déployé dans plusieurs pays européen. Grâce à 100 millions d’euros récoltés, l’objectif est de faire de même aux Etats-Unis et en Asie. Et comme Sigfox est le premier a avoir flairé ce filon et à proposer une solution, il sera difficile de le rattraper. "Faire mieux que nous sera impossible ou alors marginalement. Si quelqu’un faisait la même chose, potentiellement il entrerait en conflit avec nos brevets, on en a déposé de nombreux", a expliqué son fondateur, Ludovic Le Moan, à Europe 1. Avant d’ajouter : "l’enjeu est effectivement de couvrir les Etats-Unis et le monde : la concurrence aura alors beaucoup de mal à pénétrer ce marché".
La prochaine étape consistera à débarquer aux Etats-Unis, marché clef pour les objets connectés et où le groupe aimerait entrer en Bourse en 2016, probablement au Nasdaq, à dominante technologique. Un objectif pas si farfelu : d'ici 2020, selon les études, on estime qu'il y aura entre 50 à 90 milliards d'objets connectés dans le monde.
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