Il n'y a pas que les journalistes qui voient une anguille sous roche dans l'accord Hersant-Tapie. L'homme d'affaires, connu pour ses coups d'éclat, a mis la main sur les titres de presse du Groupe Hersant Médias (GHM), dont La Provence et Nice Matin. Il va détenir deux tiers des actions, l'autre tiers restant à Hersant. Et si les employés craignent une volonté de l'ex-député radical gauche de briguer la mairie de Marseille, les banques, elles, soupçonnent un tour de passe-passe financier réussi par Hersant. On vous explique tout.
L'accord décortiqué. L'offre de reprise est de 51 millions d'euros. Selon La Correspondance de la presse datée du 20 décembre, Bernard Tapie va apporter 24 millions d'euros, la famille Hersant 24 millions, et le reste doit venir de la vente des Nouvelles calédoniennes, le quotidien de Nouvelle-Calédonie, qui dégage entre 2 millions et 3 millions de résultat net. Selon Le Monde, des "entrepreneurs locaux" sont intéressés.
Une belle opération pour Hersant. L'apport de la famille Hersant est donc limité, au regard des 215 millions de dette de GHM qui vont en grande partie disparaitre. "Même BNP-Paribas, la Société générale et Natixis, les établissements les plus hostiles à l'offre Tapie, ont cédé. Les banques abandonnent ainsi près de 160 millions de créance", décrypte le quotidien du soir.
Or, une fois débarrassé de cette dette, Hersant continuera de bénéficier - pour un tiers - des résultats de journaux qui restent rentables. La Provence et le groupe Nice Matin, Var Matin, Corse Matindégage chacun un résultat brut d'exploitation de 5 millions. Nice Matin possède aussi un patrimoine immobilier d'une valeur considérable, installé sur la Côte d'Azur. Et Corse Matin serait le quotidien local le plus rentable de l'hexagone, avec une diffusion de 40 000 exemplaires pour 300 000 habitants.
Comment les banques ont-elles donc pu abandonner 160 millions de dettes? Tout simplement parce qu'elles n'avaient pas le choix. La direction de Groupe Hersant Média avait posé un ultimatum aux 17 établissements créanciers : l'offre Tapie ou le dépôt de bilan. Or, aucun autre repreneur crédible n'était pour le moment en lice. L'offre du groupe belge Rossel a été rejetée car elle "reprenait la totalité des titres, mais pas la holding, laissant la question de sa liquidation", et parce que sa proposition était financièrement "moins disante de quelques millions", selon une source citée par l'AFP. Les banques ont préféré laisser partir une grande partie de leurs créances, plutôt que la totalité.