Comment faire baisser les tarifs autoroutiers ? À défaut de pouvoir peser directement sur les sociétés autoroutières, l’État pourrait s'en prendre… aux maisons mères, c'est-à-dire aux groupes qui possèdent ces sociétés. C'est ce que propose le think tank social-libéral Terra Nova, dans un rapport révélé mercredi. Possible ? Pas sûr...
>> L'étude de Terra Nova est à retrouver dans son intégralité ici
Le contexte. Du gouvernement à l'Autorité de la concurrence en passant par la Cour des comptes, le constat est unanime : les sociétés d'autoroutes font beaucoup de profits, et ne les partagent pas assez avec les automobilistes. Le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a encore déclaré ce weekend qu'il voulait leur "mettre la pression" pour que les tarifs baissent. Le hic : l'Etat ne peut pas faire grand-chose. En France, le réseau autoroutier est en effet exploité par sept sociétés privées. Et leurs contrats, ultrasolides juridiquement, empêchent l'Etat de peser dans les tarifs des péages jusqu'à 2027 minimum.
La proposition. Terra Nova propose donc de taxer les sièges sociaux des entreprises qui possèdent ces sept sociétés, et non les sociétés elles-mêmes (ASF, APRR, Sanef…). Ce qui revient à ponctionner trois groupes, qui ont la main sur toutes les concessions : Vinci, Eiffage et Abertis. Une "fiscalité exceptionnelle" qui pourrait entraîner une baisse du coût des péages pour les automobilistes de 50%, selon le think tank. Cette fiscalité permettrait en effet à l’État de redistribuer l'argent aux automobilistes ou de faire simplement pression sur les entreprises pour qu'elles baissent leurs tarifs, ou encore de les pousser à rompre carrément les contrats.
"La mise en place d'une fiscalité exceptionnelle sur les maisons mères de ces sociétés permettrait à l'État de récupérer à court terme une partie de la rente autoroutière et à moyen terme de renégocier les contrats de plan", assure le rapport.
La difficulté. "Le Conseil constitutionnel risque de juger qu'il y a un petit problème", prévient toutefois Yves Crozet, professeur au Laboratoire d’économie des transports, à l'Université Lyon 2, contacté par Europe1.fr. "Je leur souhaite bon courage pour passer le Conseil constitutionnel", confie également un avocat spécialisé, mercredi dans Challenges.
En effet, cette mesure risque de poser un principe d'égalité : la maison mère d'Abertis se trouve en Espagne, et ne peut donc pas être taxée. Pas sûr, donc, qu'Eiffage et Vinci acceptent l'idée sans broncher. Et sans saisir le Conseil constitutionnel. "Terra Nova se fait plaisir, il parle à son lectorat", raille ainsi Yves Crozet en guise de conclusion.