Entre Arnaud Montebourg et le patron de Titan, la guerre est déclarée. Le ministre du Redressement productif, qui avait reçu de l'Américain une lettre virulente dénonçant les conditions de travail en France, a à son tour adressé une lettre de réponse en forme de défense de l'industrie française.
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L'attaque : des "soi-disant ouvriers". Dans une lettre envoyée le 8 février au ministère du Redressement productif, et dévoilée mardi, Maurice Taylor, le patron de Titan, expliquait pourquoi il avait refusé de négocier le rachat de l'usine Goodyear d'Amiens. Un texte particulièrement virulent, qui se moquait du "syndicat fou" et des "soi-disant ouvriers", qui "ne travaillent que trois heures, ont une heure de pause pour déjeuner et discutent trois heures", avant de s'interroger : "Vous voulez que Titan démarre une discussion. Vous pensez que nous sommes si stupides que ça ?"
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La contre-attaque : des propos "ridicules". En réponse, Arnaud Montebourg n'hésite pas à qualifier les propos de Maurice Taylor de "ridicules". "Vos propos aussi extrémistes qu'insultants témoignent d'une ignorance parfaite qu'est notre pays, la France", écrit-il. Pour le ministre, Titan, qui ne manque pas de critiques à l'encontre de l'industrie française, aurait plus intérêt à s'en inspirer : "Puis-je vous rappeler que Titan, l'entreprise que vous dirigez, est 20 fois plus petite que Michelin (…), et 35 fois moins rentable ? C'est dire à quel point Titan aurait pu apprendre et gagner énormément d'une implantation française."
Pour Arnaud Montebourg, les critiques de Titan font l'impasse sur "l'amitié ancienne et passionnée" qui lie les deux pays. "Savez-vous au moins ce qu'a fait Lafayette pour les Etats-Unis ? Pour notre part, nous n'oublierons jamais le sacrifice des jeunes soldats américains sur les plages de Normandie pour nous délivrer du nazisme." D'ailleurs, il ne cache pas son admiration pour l'administration Obama : "En tant que ministre chargé de l'Industrie, je suis particulièrement sensible à ses actions en faveur de la relocalisation des emplois industriels aux Etats-Unis", souligne le ministre, qui trouve même "une certaine parenté" entre les politiques industrielles des deux pays.
Et la menace : Titan sera surveillé de près. Mais le ministre ne se contente pas de mots pour répondre à Maurice Taylor. Le PDG de Titan veut-il "acheter un fabricant indien, payer moins d'un euro l'heure de salaire et exporter tous les pneus dont la France a besoin"? Pas de problème, les services des douanes l'attendent de pied ferme. "La France, avec des alliés de plus en plus nombreux au sein de l'Union européenne, plaide pour la réciprocité des échange et s'organise contre le dumping", avertit Arnaud Montebourg. "Soyez assuré de pouvoir compter sur moi pour faire surveiller par les services compétents avec un zèle redoublé vos pneus d'importation. Ils veilleront tout particulièrement au respect des normes applicables en matière sociale, environnementale et technique". En clair, Titan pourrait payer en espèce sonnantes et trébuchantes ses attaques à l'encontre de l'industrie française.