Le chiffre. On savait qu’un nombre croissant de ménages a du mal à payer ses factures d’électricité et de carburant, les prix de l’énergie n’ayant cessé de grimper au cours des dernières années. On connaissait la tendance, on a désormais un chiffre : plus de 11 millions de personnes, soit un cinquième de la population française, ont du mal à se chauffer et s'éclairer correctement, selon les chiffres de l'Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE).
Qu’est-ce que la précarité énergétique ? Elle débute lorsqu’un foyer doit consacrer plus de 10% de ses revenus à l’énergie, mais pas seulement : cet indicateur prend aussi en compte les comportements (le fait de moins se chauffer volontairement) et le ressenti du froid. Sur cette base, "l'ensemble des populations en situation de précarité énergétique dans leur logement serait de l'ordre de 5,1 millions de ménages (et 11,5 millions d'individus), soit environ 20% de la population totale", souligne l'ONPE.
Les classes moyennes aussi concernées. Les personnes en précarité énergétique ne sont pas forcément les plus démunies : sur les 5,1 millions de foyers concernés, plus de 1,2 million ont des revenus corrects légèrement supérieurs au Smic. C’est souvent le cas des personnes âgées qui se retrouvent seules dans un grand logement mal isolé. Ou encore des familles qui s'éloignent des centre-villes pour trouver des logements moins chers mais font exploser leurs dépenses de carburants.
Les carburants alourdissent la facture. Ainsi, Florence, son mari et ses deux enfants se sont éloignés de Châlons-en-Champagne, où ils travaillent tous les deux, et on réussi à diviser par deux, voire trois, leur loyer. Mais les dépenses de carburants captent désormais un quart de leurs revenus.
"On est à, grosso modo, sept pleins par mois à 70 euros. Donc pour les deux véhicules on est à 500 euros de gasoil par mois. Si on se rapproche, ce sera toujours les mêmes sommes qui sortiront, sauf qu’on les mettra plus dans le gasoil mais dans les loyers", témoigne-t-elle pour Europe 1.
Et cela ne va pas s’arranger. Le nombre de foyers en précarité énergétique risque de ne pas reculer puisque plusieurs augmentations sont déjà prévues. Le diesel sera taxé 4 centimes de plus par litre, soit 25 euros supplémentaires par mois pour cette famille de Châlons-en-Champagne. Quand aux tarifs de l’électricité, ils vont augmenter de 2 à 3% dès cet automne. Tout comme ceux du gaz, en hausse de plus de 6% cet automne.
Ces solutions prônées par l’ONPE. Pour limiter cette précarité énergétique, l’observatoire privilégie deux pistes : instaurer un chèque énergie pour limiter les impayés et subventionner la rénovation énergétique des logements des ménages modestes.
Sa première piste, un chèque énergie, est déjà à l’étude puisque les députés sont en train d’en débattre dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique. Un tel projet permettrait de combler les lacunes des tarifs sociaux, qui ne portent que sur l’électricité et le gaz, pour englober tous les types de chauffage. Prenant en compte toutes les formes d’énergie, ce chèque permettrait aussi de limiter les impayés et donc les coupures, a argumenté Bruno Léchevin, le président de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).
Pour limiter la facture, il faut également disposer d’un logement bien isolé. L’ONPE préconise donc d’aider les foyers modestes à rénover. "Pour les ménages aux ressources modestes, le principe de la subvention publique est incontournable, leur capacité contributive étant très limitée voire inexistante", rappelle l’observatoire.
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