Le président Emmanuel Macron recevait lundi matin la plupart des représentants d'un monde agricole en crise, quelques semaines après le lancement des États généraux de l'alimentation et une dizaine de jours après un arbitrage contesté du gouvernement sur les aides européennes.
Un "juste" prix. Au centre des entretiens qui devaient durer environ une demi-heure chacun, la revendication pour les producteurs d'un "juste" prix face aux exigences de la distribution ou aux demandes de l'agroalimentaire. "Il faut faire en sorte que, demain, nous ne perdions plus de paysans", a plaidé Jérémy Decerle, des Jeunes agriculteurs, à la sortie de son entretien avec Emmanuel Macron. Il lui a rappelé que la France avait perdu un quart de ses paysans au cours des dix dernières années et appelé à des mesures pour relancer "l'attractivité" d'un secteur qui traverse depuis plusieurs années une crise profonde.
Trois ans de crise. "Nous sortons de trois ans de crise pour l'élevage, les céréaliers aussi depuis deux ans", a renchéri Bernard Lannes, président de la coordination rurale, qui revendique le titre de deuxième syndicat agricole. Dans le bureau du président, il a exprimé le vœu que les États généraux de l'alimentation permettent de "réorienter l'alimentation" mais, selon lui, cela ne peut se faire sans modifier la PAC (politique agricole commune européenne), "ultra-libérale". La Coordination rurale, qui voudrait un "plan Marshall" pour l'agriculture, souhaite aussi demander à Emmanuel Macron d'intégrer le Haut-conseil de la coopération agricole pour "lutter contre les dérives de certaines coopératives" qui "ne défendent plus les intérêts de leurs adhérents".
La répartition des aides européennes abordée. Les organisations ont également abordé la question de la répartition des aides européennes, tant la décision du ministre Stéphane Travert de rééquilibrer les budgets cette semaine a suscité de fureur, aussi bien dans le monde agricole que chez les ONG environnementales. Stéphane Travert a décidé de transférer une partie des aides européennes du "pilier 1" de la politique agricole commune (aides à l'hectare) vers le "pilier 2" (développement rural, aide à l'agriculture de montagne, installation des jeunes agriculteurs, aide à la bio).
La Confédération paysanne souhaite également que soit "enclenchée la transition de l'agriculture" vers un modèle plus durable. Le Modef souhaite pour sa part mettre l'accent sur la crise de l'élevage et la situation épineuse des producteurs de palmipèdes face à la grippe aviaire, et demander une révision de la loi de modernisation de l'Economie (LME). Absente, la présidente du premier syndicat, FNSEA, Christiane Lambert, a déjà été reçue le 18 juillet, avant le démarrage des États généraux.
Conclusions de la première phase attendues en octobre. Emmanuel Macron présentera mi-octobre les conclusions de la première phase des États généraux de l'alimentation sur la création et la répartition de la valeur, censée répondre aux difficultés financières rencontrées par certains agriculteurs. Le chef de l'État, qui a promis de "permettre aux agriculteurs de vivre de leur métier", a ainsi signalé aux syndicats d'agriculteurs lundi qu'il s'impliquerait personnellement dans ces travaux. Emmanuel Macron avait annulé sa participation au lancement des États généraux, qui doivent se conclure fin novembre, avec un compte rendu final attendu vers la mi-décembre, suscitant des inquiétudes sur son intérêt pour ce dossier.