"Boost" va-t-elle pouvoir décoller ? La création de la nouvelle compagnie du groupe Air France-KLM, annoncée en novembre dernier, est soumise à un référendum consultatif des pilotes jusqu’au 13 février. Depuis vendredi, le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), largement majoritaire, demande à ses adhérents de répondre à la question suivante : "Approuvez-vous l'externalisation d'une partie de l'activité et de la flotte long et moyen courriers d'Air France dans une nouvelle structure ?" À travers cette question, les pilotes doivent se prononcer sur l’avenir de Boost – le nom est provisoire –, compagnie aérienne à bas coûts que souhaite lancer Air France sur le moyen courrier à la fin de l’année et sur le long courrier en 2018. Une compagnie censée fonctionner grâce à 28 avions ponctionnés sur la flotte d’Air France, avec des pilotes volontaires venus de la compagnie historique et des hôtesses et stewards recrutés en externe.
Bras de fer syndical. La direction du SNPL s’oppose au projet Boost, fer de lance du plan stratégique "Trust Together" (2017-2020). Depuis son annonce en novembre, elle met en garde contre un éparpillement du groupe. La direction d’Air France a donc décidé de s’adresser directement à l’ensemble des pilotes dans un courrier interne. Elle dit regretter que la question du référendum soit "incomplète" et met en avant les autres avancées obtenues lors des négociations. Parmi elles, le contrat unique, réclamé de longue date par les pilotes. A l’automne 2014, lors de la plus longue grève de l’histoire d’Air France, la direction n’avait pas cédé sur cette revendication des salariés. Deux ans plus tard, les représentants du SNPL ont obtenu que les pilotes qui iront voler chez Boost bénéficieront des mêmes conditions de travail que chez Air France. Ce qui ne sera pas le cas pour le personnel de cabine (PNC), moins bien payé sur la nouvelle compagnie.
Nouvelles embauches. "Vous n'avez qu'à y gagner, à commencer par la croissance" et "toutes les conséquences positives qu'elle apportera pour vous après des années de stagnation", avance le directeur général d’Air France Franck Terner dans ce courrier. Dans une autre communication interne, la direction explique que la compagnie favorisera les avancements de carrière et permettra de porter les effectifs pilotes à "environ 4.050" en 2020, "contre 3.715 aujourd'hui", par "l'embauche d'environ 200 pilotes par an".
Rétablir la confiance. La direction de la compagnie aérienne espère ainsi convaincre les pilotes de voter en faveur du projet Boost. Un accord serait signe d’un nouveau départ dans la relation qu’elle entretient avec les pilotes. Les dernières années ont été marquées par des grèves dures. En septembre 2014, la compagnie avait connu une grève de quatorze jours, la plus longue de son histoire, les pilotes protestant contre des délocalisations. Cette année, les pilotes avaient appelé à cesser le travail juste avant le début de l’Euro de football. Ils se plaignaient d’un déséquilibre dans les investissements en faveur de KLM alors qu’Air France pique du nez depuis des années. La confiance n’a guère plus cours au sein de la compagnie aérienne.
Encore des divergences. Toutefois, rien n’est encore joué. Certes, les négociations sur le projet Boost "vont dans le bon sens" selon les participants. La direction et le SNPL doivent se retrouver mardi et mercredi pour un nouveau round. Et, alors que les négociations devaient prendre fin le 31 janvier, la direction a décidé de les prolonger sans fixer de date butoir pour ne pas brusquer les pilotes. Plusieurs points font en effet l'objet de divergences. Air France souhaite que les pilotes de la compagnie acceptent d'améliorer leur productivité. "Les efforts nécessaires à la création de la nouvelle compagnie seront mutualisés sur l'ensemble des pilotes", indique la direction qui promet la mise en place d'un "dispositif supplémentaire d'intéressement".
En effet, Boost doit fonctionner pour un prix moindre qu’une compagnie aérienne classique afin de pouvoir concurrencer les compagnies du Golfe. La direction veut créer un avantage compétitif de 15% par rapport à Air France. Pour ce faire, elle compte sur une productivité accrue des pilotes, sur l’emploi de PNC plus jeunes et donc moins bien payés que les actuels qui bénéficient de l’ancienneté et sur un nombre de services payants plus importants. Pour autant, Boost ne sera pas une compagnie low cost pour les passagers.
Un accord avant le 16 février ? Les demandes de la direction ne font pas l’unanimité chez les pilotes : "Nous n'accepterons pas d'efforts supplémentaires cumulés à l'arrivée massive d'emplois précaires" (Air France va recourir à des CDD et alternants), indiquait récemment dans un tract l'Unsa-PNC, en lançant un avertissement : "La direction doit modérer ses appétits car sinon ce sera la guerre !". Preuve que le dialogue social n’est pas complètement apaisé chez Air France… Jean-Marc Janaillac souhaite disposer d’un accord mi-février afin de pouvoir présenter des résultats positifs sur ce front lors de la présentation des résultats annuels d’Air France-KLM le 16 février. Le compte à rebours est lancé.