La filiale low cost d'Air France vient d'ouvrir une première base à Munich. Les syndicats de pilotes dénoncent un reniement de leur direction.
Transavia est prêt à décoller en Europe. C'est Alexandre de Juniac, patron de la maison mère de la compagnie, Air France-KLM, qui a donné le feu vert à la filiale low-cost, jeudi à Munich. La ville allemande est ainsi devenue la première base de Transavia hors de France et des Pays-Bas.
Accélérer sur le low cost. La stratégie d'Air France est claire : accélérer le développement de son activité low cost pour soutenir la concurrence face aux autres compagnies à bas coût, comme EasyJet ou Ryanair. L'an dernier, Transavia a transporté "10 millions de passagers, pour un chiffre d'affaires de plus d'1 milliard d'euros", a annoncé Alexandre de Juniac. "Notre objectif est d'atteindre plus de 20 millions de passagers en 2019." Pour ce faire, le PDG compte renforcer la flotte de la compagnie. De 67 appareils aujourd'hui, elle devrait passer à une centaine dans trois ans. "A cette date, Transavia générera environ 10% du chiffre d'affaires passagers du groupe." Et d'autres bases, sur le même modèle que celle de Munich, devraient avoir ouvert.
Les pilotes exigent des garanties. Pour la direction d'Air France-KLM, qui espère finaliser le redressement du groupe en perte de vitesse ces dernières années, investir le marché du low cost, en croissance de 8% par an, est indispensable. Mais les pilotes, qui dénoncent un risque de dumping social et de délocalisation des emplois parisiens, exigent des garanties. Les négociations autour du développement de Transavia en France sont d'ailleurs toujours en cours. Quant à la question d'investir le Vieux Continent, elle est encore plus sensible. Il y a presque deux ans, la présentation du plan "Transavia Europe" avait déclenché la colère des syndicats et une grève sans précédent. A tel point que la direction avait annoncé l'abandon définitif du projet.
" "Ne soyons pas dupes. La direction revient sur son engagement" "
Un projet "totalement différent". Aujourd'hui, Air France-KLM se défend de toute volte-face. "Transavia Europe a été mis à la poubelle. C'était un projet totalement différent de ce que nous entreprenons aujourd'hui", a expliqué Alexandre de Juniac au Figaro, pointant le fait qu'aucun des vols de la base munichoise "n'est opéré par Air France ou par KLM". Mais du côté des syndicats de pilotes, l'opposition est toujours aussi vive. Emmanuel Mistrali, porte-parole du SNPL majoritaire, dénonce à Europe1.fr un jeu sur les mots. "C'est de la sémantique. Ne soyons pas dupes. En réalité, la direction revient sur son engagement", peste le syndicaliste.
Siphonner le marché d'Air France. Pour le SNPL, ouvrir des bases Transavia en Europe présente bien un risque non seulement de dumping social, mais aussi de siphonage du marché d'Air France. En outre, cette stratégie relève de la "dispersion". "Nous voulons d'abord développer Transavia France en maintenant un équilibre entre Transavia et Air France", explique son porte-parole. "On demande encore des efforts aux salariés d'Air France, ce n'est pas pour s'engager dans des investissements hasardeux."
Les syndicats hollandais plus favorables. Pour pouvoir ouvrir la base de Munich, la direction du groupe a d'ailleurs soigneusement évité de s'adresser aux syndicats de pilote français, préférant confier sa gestion à Transavia Holland. La filiale batave de la compagnie "a signé avec les syndicats des pilotes hollandais un accord qui permet de croître dans de bonnes conditions économiques hors du territoire hollandais", a indiqué Alexandre de Juniac. Celui-ci espère que les syndicats français suivront la même voie et brandit la menace d'un "déclassement" de la compagnie si celle-ci ne fait pas du low cost une priorité. Pour Emmanuel Mistrali, la situation des pilotes français est bien trop différente de celle des hollandais pour être comparée. "Transavia Holland a déjà consolidé son marché, qui ne phagocyte pas celui de KLM", contrairement à ce qui, selon lui, se passe dans l'Hexagone. Le syndicaliste invite donc la direction d'Air France à se concentrer sur Transavia France. "Nos propositions sont sur la table, il suffit de se lancer."