Air France : une grève des pilotes qui passe mal

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ZOOM - Les trois syndicats de pilotes appellent à faire grève à partir de samedi, en plein début de l’Euro de football.

Si le gouvernement s'évertue à déminer un par un les dossiers liés au projet de loi Travail, il est une profession qui lui donne du fil à retordre : les pilotes de ligne chez Air France. Opposés aux plans de compétitivité prévus par la direction de la compagnie aérienne, les pilotes doivent faire grève du 11 au 14 juin, voire au-delà alors que débute vendredi l'Euro.

Que se passe-t-il chez Air France ? La compagnie a perdu de l’argent pendant sept des huit dernières années et tente de se réinventer pour ne pas sombrer. Elle a donc mis en place un plan de productivité baptisé Transform 2015 et espère rempiler dans la foulée avec un autre plan, Perform 2020. Sauf que le premier plan n’a toujours pas été appliqué entièrement : si tous les autres corps de métiers ont rempli leurs objectifs, ce n'est pas le cas des pilotes. Ces derniers estiment en effet que la direction n’a pas joué le jeu ni mis en place les contreparties promises. Mais la justice a donné raison à la direction d’Air France, qui a donc décidé d’imposer les dernières mesures prévues par le plan Transform 2015.

La riposte des syndicats de pilotes n’a pas tardé : ils appellent à la grève du 11 au 14 juin inclus pour défendre l'emploi et protester contre une modification de certaines règles de  rémunération.  

Axel de Tarlé est revenu sur leurs revendications, mercredi matin dans la chronique Les Experts d’Europe 1. "Leurs exigences sont jugées irréalistes par la direction : quatre milliards d'investissement et de hausses de salaires de 11 % sur deux ans. Le tout pour des gens qui sont déjà très bien payés, jusqu'à 19.000 euros par mois pour un commandant de bord en fin de carrière", assure-t-il. 

"Au-delà de leur revendication, ce qui choque, c'est cette impression que les pilotes sont dans leur bulle, déconnectés des réalités économiques d'une compagnie", a poursuivi Axel de Tarlé :  


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Les pilotes de ligne se voient également reprochés le moment choisi pour faire grève, en plein début d'Euro. La compétition est en effet censée servir de vitrine à la compagnie aérienne auprès de la clientèle étrangère : une nouvelle grève d'écorner un plus l'image d'Air France, mais aussi du pays tout entier alors que le tourisme est l'une de ses forces. Cette grève est d'autant plus prise au sérieux qu'elle intervient au pire moment, au début de l'été. Or, comme ses rivales, Air France voit son activité bondir de 20 à 35% l'été par rapport à l'hiver.  

Une grève de plus en plus décriée. Ces blocages à répétition sont de moins en moins bien accueillis, et pas seulement par le patron sortant d’Air France Alexandre de Juniac, qui a jugé cette nouvelle grève "déplorable". A droite, le ton n'est pas plus conciliant. François Fillon a ainsi qualifié ce mouvement de "minable" : "je vois que les pilotes d'Air France menacent de faire grève au milieu de l'Euro, franchement c'est minable et j'espère que le bon sens l'emportera", a-t-il déclaré mardi sur TF1, avant d’ajouter : les "revendications catégorielles de syndicats minoritaires qui représentent des salariés protégés sont insupportables".

Chose rare, les critiques proviennent même des formations syndicales. "Je crois que ce sera une très mauvaise image, mais c'est plus qu'une image, c'est une mise en danger de la compagnie", a déclaré Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT. Et ce dernier de de poursuivre, encore plus critique : "Ça fait longtemps que je dis que la vision du syndicat des pilotes à Air France est une vision corporatiste qui ne tient pas compte des enjeux pour l'ensemble des salariés d'Air France".