Le village de Flavigny, au coeur de la campagne bourguignonne, est construit autour d’une abbaye fondée au VIIIe siècle. Derrière ses murs en pierre épais, rien ne venait jamais troubler le silence des moines. Sauf le bruit de petites billes rondes roulant dans de larges cuves… Un document atteste que, dans ce lieu dès 1591, des bénédictins fabriquaient des bonbons qu’ils offraient aux papes et aux évêques de passage. Les fameuses anis de Flavigny !
La recette est aujourd’hui encore secrète. Plus secret encore : les gourmands qui aiment les anis de Flavigny sont peu nombreux à savoir que derrière ces confiseries se cache une histoire de famille unique en son genre, une histoire d’entrepreneurs. "Ma grand-mère venait du Jura, de la forêt. Et une forêt, on la plante toujours pour la génération d’après. Quand je suis arrivée à 27 ans, j’avais envie de faire plein de choses mais je pensais qu’en 3 ans tout serait réglé. Je n’ai toujours pas fini. Il faut 15 jours pour faire un bel anis et il faut du temps pour faire une entreprise solide", assume Catherine Troubat aujourd’hui à la tête du groupe "Anis de Flavigny".
"Il faut 15 jours pour faire un bel anis"
Pour retrouver les origines des anis, il faut en réalité sans doute remonter avant même la construction de l’abbaye de Flavigny. Tout près, se trouvait le site d’Alesia, celui-là même où Jules César est venu pour défaire Vercingétorix. Dans ses bagages, il aurait apporté une petite graine originaire du Bassin méditerranéen. L’idée de fabriquer autour de l’anis un bonbon avec plusieurs couches de sucre et quelques arômes serait venue ensuite.
Découvrez les anis de Flavigny dans le podcast "Marques de famille"
>> Cet épisode et tous les autres sont disponibles sur notre site Europe1.fr et sur Apple Podcasts, Google Podcasts, SoundCloud, Dailymotion et YouTube, ou vos plateformes habituelles d’écoute.
>> Retrouvez ici le mode d'emploi pour écouter tous les podcasts d'Europe 1
Mais cette confiserie n’a pas tardé à trouver ses adorateurs. On sait notamment que Louis XIV possédait un petit drageoir pour cacher ses propres bonbons. On sait également qu’en 1763, le fantasque Chevalier d’Eon, espion de Louis XV, offrit en cadeau des anis de Flavigny à George III, roi d’Angleterre, pour l’adoucir avant la signature d’un traité de paix.
Mais en 1789, la Révolution gronde. Les privilèges sont abolis, les biens du clergé sont saisis. L’abbaye est vide et certains n’hésitent pas à la transformer en carrière de pierre. Huit habitants décident alors de reprendre à leur compte la tradition des anis de Flavigny. Ils installent pour cela leur atelier entre les murs de l’abbaye.
Le premier bonbon vendu dans les couloirs du métro !
Mais cet artisanat a besoin de plus pour continuer à se développer. En 1923, Jean Troubat crée enfin une véritable entreprise et installe des machines pour faire entrer la recette des anis de Flavigny dans le XXe siècle. Cet entrepreneur fourmille d’idées pour faire connaître sa recette partout en France. Il installe ainsi des distributeurs automatiques de bonbons directement dans les couloirs du métro à Paris. Il en fait ensuite de même dans les salles de cinéma, les grands magasins, les gares ou dans les fêtes foraines.
Quand Jean Troubat a passé la main à sa fille Catherine, qui avait commencé sa carrière dans le design et ne s’imaginait pas prendre sa suite un jour, il lui a transmis tout son savoir-faire évidemment. A charge désormais à cette nouvelle génération de perpétuer cette tradition. En ne changeant pas le décor romantique qui orne chaque boîte d’anis de Flavigny : on y voit un berger qui offre à une jeune fille des bonbons. Ces personnages sont devenus l’image, partout dans le monde, des anis fabriquées à Flavigny.