Ariane 6 n'existe encore que sur le papier mais elle se concrétise. L'Agence spatiale européenne (ESA) a en effet signé mardi le contrat de développement de la remplaçante d'Ariane 5 avec la coentreprise Airbus Safran Launchers (ASL). D'un montant de 2,4 milliards d'euros, il "va financer les travaux de développement du lanceur Ariane 6 et son industrialisation jusqu'à sa phase de pleine capacité opérationnelle en 2023", a annoncé l'ASL. Un vol inaugural est cependant prévu dès 2020.
"Prix très concurrentiels". "Ces contrats vont permettre de mettre au point toute une famille de lanceurs européens hautement compétitive sur le marché mondial, et de garantir aux États membres de l'ESA un accès autonome à l'espace, à des prix très concurrentiels", a déclaré Jan Woerner, directeur général d'ASL. Les contrats prévoient aussi l'amélioration de Vega, le petit lanceur de l'ESA de conception italienne.
Un changement de modèle économique. Ces contrats sont aussi "un changement majeur dans la gouvernance du secteur européen des lanceurs, l'industrie étant désormais l'autorité de conception, assumant l'entière responsabilité du développement et de l'exploitation des lanceurs, et s'engageant à les livrer à l'ESA et aux acteurs institutionnels européens à des prix compétitifs définis", a ajouté Jan Woerner. C'est en effet la première fois qu'Ariane est en quelque sorte privatisée. L'Agence spatiale européenne avait pourtant travaillé sur sa propre Ariane 6, un projet finalement écarté par l'Union européenne qui le jugeait trop peu compétitif.
Contrer SpaceX. C'est en décembre 2014 que les ministres européens de l'Espace s'étaient mis d'accord sur le projet d'Ariane 6 proposé par Airbus et Safran, deux entreprises qui y travaillaient depuis 2012. L'objectif est clairement de parer dans le futur à la montée en puissance de l'américain SpaceX, petit poucet devenu grand, dont les prix sont aujourd'hui plus compétitifs que ceux d'Ariane 5, 60 millions d'euros pour le lancement d'un petit satellite contre 80 millions demandés par le lanceur européen.
Version modulable… C'était le principal enjeu des négociations : Ariane 6 devait-elle être un gros ou un petit lanceur ? Finalement, la poire a été coupée en deux puisque le projet d'ASL est une fusée modulable. Ariane 6 aura deux boosters en cas de petite charge et pourra se voir ajouter deux autres boosters en cas de charge plus importante.
… et en partie réutilisable ? SpaceX l'expérimente déjà sans succès, le Japon court après… la fusée réutilisable est un projet qui fait fantasmer nombre d'agences spatiales dans le monde. Et pour cause, elle permettrait de faire des économies monstres en faisant revenir sur Terre les propulseurs et le moteur d'un lanceur au lieu de les refabriquer pour chaque lancement. C'est pour cette raison qu'Airbus travaille depuis 2010 à ce projet, l'objectif étant d'en faire bénéficier la future génération de fusée Ariane. Pourvue d'un bouclier thermique pour la protéger lors de son entrée dans l'atmosphère terrestre, la partie inférieure d'Ariane 6, qui représente 80% de sa valeur, pourrait ainsi être récupérée.