"L'État paiera", avait annoncé lors de sa seconde allocution liée au coronavirus le président de la République Emmanuel Macron. Un mois plus tard, les députés ont voté dans la nuit de vendredi à samedi un plan massif, qualifié de "budget de crise", à hauteur de 110 milliards d'euros. Une somme colossale, qui risque d'avoir de lourds impacts sur le déficit, mais nécessaire pour venir en aide à l'économie française. Car la récession guette : "Elle est quasiment trois fois supérieure à celle de 2009", affirmait sur notre antenne le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale Éric Woerth.
Une prime pour les soignants, le chômage partiel élargi
Le texte de loi finance la prime exceptionnelle de 500 à 1.500 euros destinée aux soignants, applaudis par les Français tous les soirs depuis le début du confinement. Il intègre l'aide aux ménages les plus modestes (allocataires des minimas sociaux) de 150 euros, plus 100 euros par enfant, annoncée par l'exécutif mercredi.
L'Assemblée nationale a aussi élargi le chômage partiel à certaines catégories. Ce nouveau budget porte notamment à 24 milliards d'euros les crédits alloués au dispositif, dont un tiers pris en charge par l'Unedic. "Près de neuf millions de salariés aujourd'hui sont au chômage partiel", ce qui doit éviter des "licenciements de masse", a estimé Bruno Le Maire.
Un soutien aux petites et moyennes entreprises
Les entreprises à l'arrêt ou en difficulté, sont également soutenues par ce plan. Une hausse à sept milliards d'euros est effectuée sur le fonds de solidarité en faveur des très petites entreprises et des indépendants. Ce projet de loi comprend une "avance remboursable" pour les PME qui n'obtiennent pas de prêt, ainsi qu'un fonds de soutien aux entreprises de taille intermédiaire d'un milliard d'euros.
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20 milliards créent la discorde
Au total, 90 milliards sont alloués. Reste 20 milliards, qui eux serviront à recapitaliser les grandes entreprises comme Air France, dont la nationalisation est une piste en "dernier ressort", ou PSA. Sur le papier, ce n'est pas une mauvaise idée, dit le député Matthieu Orphelin, ancien membre de la majorité, sauf que l'État ne demande aucune contrepartie à ces entreprises. "C'est une sorte de chèque en blanc", dénonce-t-il au micro d'Europe 1.
"Il n'y a aucune garantie que ces entreprises prennent des engagements fermes", regrette-t-il, avançant par exemple que l'État aurait pu contraindre Air France à arrêter progressivement les vols intérieurs sur les liaisons où un TGV existe. "Je crois tout simplement que le gouvernement n'avait pas envie de demander des contreparties aux grandes entreprises", poursuit Matthieu Orphelin.
"Les conditions de vote à l'Assemblée sont très dégradées"
"Le gouvernement se dit 'aujourd'hui on sauve les entreprises, demain on les transformera', c'est une vraie erreur économique, politique et écologique (...) Il faut que nos entreprises s'engagent enfin dans la transition écologique et solidaire", conclut-il.
Certains députés de l'opposition reprochent par ailleurs à la majorité d'avoir fait passer cette mesure en catimini. Avec un confinement qui impacte lourdement les conditions de travail au Palais Bourbon, "les conditions de vote à l'Assemblée sont très dégradées", confie en coulisses un député. Mais malgré ces oppositions, le texte a fait l'objet d'une large majorité (528 contre 19) puisque seuls les députés Insoumis, le député non-inscrit José Evrard et le député Libertés et territoires Jean Lassalle ont voté contre le projet de loi.