La France est la championne du nucléaire. Après les États-Unis, c'est le pays qui détient le deuxième plus grand parc nucléaire au monde avec 58 réacteurs, répartis sur 19 centrales. Mais cette situation pourrait bientôt changer. Emmanuel Macron, qui présentera mardi les grandes lignes de la programmation pluriannuelle de l'énergie, entend réduire la part du nucléaire dans le mix énergétique français. D'ici 2035, la part de l'énergie issue du nucléaire devrait ne représenter que 50 % de l'électricité, contre 70 % actuellement. Pour y arriver, il mise sur une fermeture progressive des centrales et le démantèlement d'une dizaine de réacteurs. Mais comment fait-on pour démanteler un réacteur ? Et quel est le coût d'une telle manœuvre ? Europe 1 décrypte.
Combien de temps faut-il pour démanteler un réacteur ?
Démanteler un réacteur nucléaire est un travail long et délicat. Il faut 15 à 20 ans en moyenne pour y parvenir, selon EDF. L'évacuation des matières et des équipements dangereux ou radioactifs peut prendre entre 3 et 6 ans, le démontage des équipements soumis à la radioactivité et le découpage de la cuve du réacteur entre 10 et 15 ans et l’assainissement du site jusqu'à 5 ans.
Comment se passe le démantèlement ?
Pour démanteler un réacteur, il faut démonter la cuve, le cœur du réacteur, où avait lieu la réaction en chaîne. C'est le cas par exemple, à Chooz, dans les Ardennes, à quelques kilomètres de la frontière belge, où l'un des trois réacteurs est en cours de démantèlement.
Pour faire écran à la radioactivité, la cuve est recouverte d'eau. "Toutes les découpes et le conditionnement des déchets se font sous eau", explique Sébastien Albertini, le responsable des opérations de démantèlement à Chooz. "Les opérateurs équipés de masques et de combinaisons spéciales manipulent à distance à l'aide de perches. Une fois qu'un colis de déchets est terminé, il remonte à la surface de l'eau à l'intérieur d'un ascenseur dont la cage est blindée et pénètre dans un atelier en béton dont les murs font environ un mètre d'épaisseur pour être mis en place dans un emballage de transport. Il rejoindra ensuite les centres de stockage", ajoute-t-il.
Les futurs démantèlements se passeront-ils de la même façon ?
En principe oui. Chooz est un site pilote. Il utilise la technologie de l'eau pressurisée que l'on retrouve dans les 58 autres réacteurs en activité en France. EDF va se baser sur cette expérience pour procéder aux futurs démantèlements et notamment celui de Fessenheim. Dans cette centrale de l'Est de la France, deux réacteurs doivent être démantelés. Le chantier pourrait durer vingt ans.
Quels sont les critères de fermeture d'une centrale ?
EDF, l'exploitant, qui décide du maintien ou de la fermeture d'une centrale, se base sur plusieurs critères : la sécurité de l'approvisionnement en électricité et les emplois notamment. La répartition géographique sur le territoire, l'âge des réacteurs, pourraient aussi entrer en ligne de compte. En France, les plus vieux réacteurs en activité se situent à Bugey dans l'Ain, à Dampierre dans le Loiret et à Gravelines dans le Nord.
Combien va coûter le démantèlement des centrales ?
EDF estime à 75 milliards d'euros le démantèlement de ses 58 réacteurs. Mais l'enjeu, selon le député Les républicains Julien Aubert qui a présidé une commission sur le sujet, c'est le temps que l'Etat va laisser à EDF pour les démonter. EDF compte sur les intérêts de provisions actuellement placées sur plusieurs comptes en banque pour obtenir à terme la somme de 75 milliards d'euros. Or, si les démantèlements se font sur une durée plus courte que celle prévue par EDF, les intérêts pourraient ne pas être suffisamment importants pour financer la totalité des opérations.
Par ailleurs, EDF, qui estime que la durée de vie de ses centrales est de 40 ans, prévient qu'elle demandera des indemnisations à l'Etat, en cas de fermetures avant cette durée d'exploitation.