C'est reparti pour une journée de mobilisation. Après des actions dans les supermarchés et des opérations escargots sur les autoroutes ce week-end, les éleveurs ont décidé de contrôler dimanche soir les camions étrangers aux frontières allemande et espagnole. Un grand rassemblement est également prévu en Mayenne.
Les infos à retenir
• Dans la Sarthe, une opération escargot s'est déroulée lundi matin sur l'A81
• En Mayenne, des éleveurs en colère ont allum" un feu devant les grilles du géant laitier Lactalis, à Laval
• Les contrôles à la frontière allemande, en Alsace, ont pris fin lundi à midi. Quelque 250 à 300 camions ont été bloqués
• Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, a rappelé que l'agriculture française exporte aussi dans les autres pays européens
La Sarthe et la Mayenne mobilisées lundi. Dans la Sarthe, environ 400 tracteurs ont organisé une opération escargot lundi matin sur l'autoroute A81 entre Vaiges et La Gravelle à l'appel de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA). Dans l'après-midi, des éleveurs en colère ont jeté des pneus et des bottes de paille contre les hautes grilles métalliques qui interdisent l'accès au site du géant laitier Lactalis, avant d'y mettre le feu sous le regard de salariés.
Pour Yannick Baudin, président de la coordination rurale de la Manche qui participait au mouvement, "les agriculteurs se remobilisent parce que, entre la négociation qui a eu lieu (mercredi et vendredi dernier, ndlr) et les premiers centimes qu'on touchera, il se passera près de deux mois". "Vous avez de l'exaspération, de la résignation, de la colère, les trois réunis font un cocktail molotov de ce qui pourrait se passer d'ici le mois de septembre", explique-t-il à Europe 1.
Les agriculteurs alsaciens lèvent leurs barrages à la frontière avec l'Allemagne. Venus avec des tracteurs, un millier d'éleveurs ont pris place dimanche à partir de 22 heures sur six passages routiers entre la France et l'Allemagne, dont le pont de l'Europe à Strasbourg. L'action a été lancée à l'initiative de la FDSEA et des Jeunes Agriculteurs du Bas-Rhin. En tout, de 250 à 300 camions ont été refoulés, selon les organisateurs. Aucun incident n'est à déplorer. Lundi après-midi, les agriculteurs alsaciens ont toutefois levé les barrages qu'ils avaient érigés à la frontière avec l'Allemagne, après avoir obtenu un rendez-vous avec le ministre de l'Agriculture, ont annoncé leurs représentants à l'issue d'une réunion avec le préfet. "On lève les barrages dans l'immédiat", a déclaré le président de la FDSEA du Bas-Rhin, Franck Sander, tout en précisant que les agriculteurs du département resteraient mobilisés "en attendant des résultats".
Dominique Daul, président de la section bovine locale, contrôlait avec ses camarades les marchandises des camions afin de bloquer celles venant d'Allemagne : "on en a bloqué une dizaine déjà sur les parkings cette nuit et là, il y en a un autre qui arrive avec des légumes". "Il y a le feu dans les campagnes tout simplement", ajoute-t-il au micro d'Europe 1. "On a, par exemple, fait faire demi-tour à un camion transportant du Babybel", a précisé Franck Sander, président de la FDSEA du Bas-Rhin. "Les consommateurs pensent que c'est français, mais ce fromage vient de Slovaquie", a-t-il poursuivi. En revanche, "nous laissons passer toutes les voitures et tout ce qui vient de France", a-t-il précisé. Autre marchandise découverte par les éleveurs : du persil allemand estampillé "Prince de Bretagne" et du jambon "Saint-Alby" d'origine germanique.
Fouilles et bouchons à la frontière espagnole. Dans le Sud-Ouest, une centaine d'agriculteurs ont fouillé dimanche soir des dizaines de camions venant d'Espagne sur l'autoroute A64, menaçant de décharger la viande ou les fruits destinés au marché français s'ils en trouvaient. "On contrôle tous les camions provenant d'Espagne. On regarde la provenance des denrées alimentaires", a expliqué Guillaume Darrouy, secrétaire général des Jeunes Agriculteurs de Haute-Garonne.
"L'agriculture française est en Europe". Malgré une série de réunion sur les prix de la viande et du lait ainsi que l'annonce de mesures d'aide, les agriculteurs veulent continuer à dénoncer les "distorsions de concurrence" qui favorisent, selon eux, leurs homologues étrangers. Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, leur a rétorqué lundi que "l'agriculture française est en Europe" et que "les productions françaises exportent aussi dans ces pays". "La situation est quelque fois encore plus dramatique dans d'autres pays européens", a-t-il ajouté. Harmoniser les charges quand on sait que les salariés dans l'industrie- agro-alimentaire en Allemagne coûtent moins cher ? "On ne peut pas, gouvernement français, décider pour d'autres gouvernements", a-t-il observé, affirmant cependant que des "discussions sont en cours" en termes d'harmonisation.
Le président de la République, François Hollande, en déplacement dans le Var lundi (voir photo), a réitéré son plein soutien au monde agricole : "notre ministre de l'Agriculture a fait en sorte que nous puissions faire la pression nécessaire sur les distributeurs, les transformateurs, les abatteurs. C'est l'ensemble de ces actions qui produira leurs effets". "Que les agriculteurs soient sûrs, actions ou pas actions, que nous sommes à leur coté", a-t-il ajouté, répétant son appel à "manger français" et s'engageant à ce que l'Etat applique ce slogan dans la restauration collective publique. Un conseil des ministres européens de l'Agriculture se réunirait le 7 septembre pour débattre des demandes françaises.
Les laitiers allemands se plaignent du favoritisme pour le lait français. Après 6 jours de fronde du monde de l'élevage, un accord sur une revalorisation du prix du lait a été trouvé vendredi dernier lors d'une rencontre entre tous les acteurs de la filière au ministère de l'Agriculture. Un accord qui a du mal à passer de l’autre côté du Rhin. La fédération allemande de l'industrie laitière MIV a ainsi adressé lundi un courrier à la Commission européenne dénonçant certaines mesures "inacceptables" prises pour soutenir l'industrie du lait, notamment une préférence nationale accordée au lait français. "Ce sera à la Commission de décider si elle ouvre une enquête", a expliqué le directeur général de la MIV, Eckard Heuser.