La crise de l'élevage français continue : après les éleveurs bovins et les producteurs laitiers, les éleveurs porcins ont à leur tour tiré la sonnette d'alarme lundi, dénonçant le refus des poids lourds de l'abattage en France de ne pas respecter l'accord trouvé en juin dernier. Si les éleveurs porcins réclament une solution d'urgence, le président de la FNSEA, premier syndicat agricole de France, estime, lui, qu'il faut désormais trouver une solution de long terme. Invité d'Europe 1 mardi, Xavier Beulin a souligné souhaiter "prendre le temps de réécrire une stratégie à 20 ans pour l'agriculture".
Nouveau bras-de-fer dans la filière porcine. Depuis lundi, les deux principaux acteurs de l'abattage de porcs, Bigard et la Cooperl, ont suspendu leurs achats au marché au cadran de Plérin jugeant que le prix convenu au sein de la filière d'1,40 euro/kilo était intenable pour les abattoirs, comparé au prix en Allemagne ou en Espagne. Ces derniers indiquent ne pas vouloir appliquer ce tarif arguant qu'un autre acteur du secteur, la grande distribution, ne jouerait pas le jeu. Problème : ce tarif avait été fixé en juin dernier lors de tables rondes organisées par le gouvernement pour limiter la chute des cours et tenter d'apaiser les tensions dans le secteur.
Trouver une solution de long-terme. Invité mardi sur Europe 1 pour évoquer le dernier épisode de ce bras-de-fer, le président de la FNSEA a estimé qu'il fallait arrêter les plans d'urgence, considérés comme des rustines bine éphémères, pour engager une réflexion de long terme. "J'appelle, non pas à une énième table ronde, mais à prendre le temps de réécrire une stratégie à 20 ans pour l'agriculture, la (gestion) de la situation à la petite semaine comme aujourd'hui n'est pas satisfaisante" a-t-il souligné.
"Nous vivons une situation jamais vécue depuis plusieurs décennies et propre à notre pays, avec de grandes difficultés de compétitivité et une forme de dumping social au sein même de l'Europe pratiquée par nos voisins", a-t-il argumenté. Et le président de la FNSEA d'ajouter que les éleveurs ne sont pas les seuls en cause, loin de là. "Les éleveurs français ne sont pas plus mauvais que les autres et souvent même un peu meilleurs techniquement mais nous partons avec un handicap de 10 à 15 centimes (du kilo) par rapport à nos voisins", a-t-il souligné.
Le gouvernement promet d'être attentif. En déplacement sur une exploitation agricole dans le Gard, Manuel Valls a réagi à cette nouvelle crise en assurant que le gouvernement était sur le pont. "Nous sommes (...) très mobilisés et nous suivons la situation des éleveurs, qui n'ont pas pu hier vendre leurs porcs à Plérin", a déclaré le Premier ministre. "Nous suivons de près l'évolution des prix auxquels se sont engagés les industriels et la grande distribution et il faut garantir ce niveau de prix", a-t-il ajouté. Sans préciser quelles sanctions l'Etat pouvait appliquer pour sanctionner ceux qui ne respectent pas l'accord de juin.
Quelques minutes plus tard, le ministre de l'Agriculture annonçait la tenue d'une table ronde fin août, sans préciser qui seront exactement les participants. Objectif affiché : maintenir "la capacité à négocier, à discuter, et que chacun assume ses responsabilités".
La concurrence étrangère et ses coûts dans le viseur. Également invité d'Europe 1, Paul Auffray, le président de la fédération nationale des éleveurs de porc (FNP), a lui insisté sur les "pratiques mafieuses" de la part des industriels allemands et espagnols. "Les distorsions salariales en Europe tournent à des pratiques mafieuses en Allemagne et en Espagne, on ne peut pas continuer avec des concurrents, chez nos voisins, qui tournent à 5 euros de l'heure et s'assoient sur les normes sociales avec l'approbation de la commission européenne", a-t-il martelé.