Trois mois après son entrée en application, la loi sur l’encadrement des loyers reste théorique pour beaucoup : 42% des annonces immobilière ne respectent toujours pas la législation, selon une étude de l’association de consommateurs CLCV. Les petites surfaces et les logements loués directement par un particulier sont les plus concernés.
Ce que la loi est censée changer. La loi Alur s’attaque à l’explosion du montant des loyers, particulièrement dans les zones les plus tendues. C’est pourquoi depuis le 1er août, à la signature d'un nouveau bail ou lors d'un renouvellement, le loyer d'un logement ne peut dépasser de 20% un loyer de référence fixé par arrêté préfectoral, ni lui être inférieur de 30%. Encore faut-il que la loi soi respectée, ce que la CLCV a cherché à vérifier.
42% des petites annonces en dehors des clous. L’association de consommateurs a décortiqué quelques 650 petites annonces publiées sur cinq sites internet différents - seloger.com, fnaim.fr, leboncoin.fr, pap.fr, et century21.fr -. Un panel qui, pour être le plus représentatif, se base avec un "partage équitable" entre locations meublées et vides, et entre professionnels de l'immobilier et propriétaires-bailleurs en gestion directe. Il en ressort que 42% des loyers ne sont pas conformes à la loi et excèdent, en moyenne de 146 euros par mois, soit 1.758 euros à l'année, le montant maximum applicable.
Les petites surfaces posent toujours problème. Le type de logement visé plus particulièrement par la loi reste celui qui concentre le plus d’abus : les petites surfaces. Pour ce type de logement, le taux d'annonces conformes à la loi est le plus faible: 50% pour les 1 pièce, contre 59% pour les 2 pièces, 66% pour les 3 pièces et 78% pour les 4 pièces et plus, a constaté l'association.
Les loyers "hors-la-loi" sont aussi plus fréquents et plus excessifs lorsque le logement est meublé: seules 52% des annonces pour ce type de bien sont conformes à la loi, contre 64% des locations nues. Enfin, les abus se concentrent plus particulièrement dans certains quartiers : c'est le cas des IIe, IIIe, IVe et VIe arrondissement de Paris.
Les agences commencent à faire passer le message. Autre enseignement de cette étude : les annonces publiées par les agences immobilières sont bien plus respectueuses de la loi que celle publiées directement par les particuliers : seules 47% des annonces sont alors conformes à la loi, contre 70% via un professionnel. Le taux d'annonces respectant la loi grimpe à 80% sur century21.fr et 72% sur seloger.com. Il chute en revanche à 59% sur fnaim.fr, à 53% sur pap et même 46% sur leboncoin.fr. C'est pourquoi la CLCV demande que les sites internet comme PAP ou Le Bon Coin refusent les annonces de propriétaires qui ne respectent pas la loi.
Que répondent les propriétaires hors-la-loi ? Pour tenter de le savoir, Europe 1 a répondu à plusieurs annonces ne respectant pas la loi. Et à chaque fois, les propriétaires ont une excuse. Première explication, la plus courante : ces derniers ont contracté un emprunt pour acquérir le logement et s’ils adaptent leur loyer, ils assurent qu’ils ne pourront plus payer leur crédit. Autre ligne de défense : le caractère exceptionnel du logement, qui permet de dépasser le loyer autorisé. Un argument difficile à vérifier, tant la loi est floue sur ce point : une vue directe sur un monument peut suffire à justifier un loyer en dehors des clous.
De toute façon, les propriétaires ne risquent pas grand chose, puisqu'il n'y pas de "police des loyers" : c'est au locataire de déposer un recours s’il veut contester son loyer. Or, à ce jour, sept locataires seulement ont déposé un dossier devant la commission de conciliation.