Des baisses d’impôt de deux milliards d’euros pour huit millions de foyers, une réforme pour rendre le code du travail "plus lisible", une loi sur "les opportunités économiques"… Après la question des migrants, l’économie a été le deuxième sujet le plus abordé lors de la sixième conférence de presse de François Hollande, lundi. Le chef de l'Etat a-t-il répondu aux attentes ? On a posé la question à Anne-Laure Jumet, responsable des questions de politique économique à Europe 1.
François Hollande vous a-t-il paru assez précis dans ses annonces ?
Au contraire, il est resté trop vague sur certains sujets. On en attendait plus, notamment sur les impôts. Il aurait pu être plus précis. On connaît l’enveloppe, le nombre de foyers concernés. On sait aussi que cela concernera la première tranche de l’impôt sur le revenu. Mais on n’a toujours pas de détails précis sur les plafonds. On attendait peut-être également de lui un mea culpa sur les impôts. Il baisse les impôts, mais il ne dit pas clairement : "je les ai un peu trop augmentés". Il dilue un peu sa responsabilité.
On manque aussi de détails sur les économies à faire pour trouver de quoi financer ces baisses. Les deux milliards d’impôts évoqués correspondent aux deux milliards déjà budgétés depuis un an dans le cadre du pacte de responsabilité, qui comprenait un volet "ménages". Mais depuis, il y a eu une hausse des dépenses militaires, des aides annoncées pour les agriculteurs… Cela va quand même poser un souci budgétaire.
Outre les impôts, que fallait-il comprendre de sa réponse sur les 35h ? Il promet qu’il n’y touchera pas et en même temps, il veut donner davantage de place à la négociation en entreprise…
La durée légale du temps de travail va rester de 35h. Ce sera la durée de référence, à partir de laquelle on peut envisager des dérogations. L’idée, c’est de permettre aux syndicats représentant 50 % des salariés de fixer des règles, dérogeant au code du travail. Cela existe déjà dans le cadre des accords de maintien de l’emploi (AME) mais seulement lorsqu'une entreprise est en difficulté. En un sens, François Hollande donne raison à Emmanuel Macron. Ce dernier prône la mise en place d’AME élargis, lorsqu’une entreprise décide d’investir par exemple.
Tous les grands chantiers économiques qu'il reste à mener ont-ils été évoqués ?
On s’attendait à ce qu’il parle davantage de la loi Macron II. Il l'a à peine évoquée. L’idée est de savoir comment accompagner le retour de la croissance. Le principe, c’est "l’Uberisation" de l’économie : assouplir la réglementation dans un certain nombre de secteurs pour les ouvrir à de nouvelles sociétés. Mais Hollande a fait l’impasse, peut-être pour éviter d’agiter un nouveau chiffon rouge (le sujet ne fait pas l'unanimité dans la majorité).
De manière générale, le problème de ces conférences est que les questions posées n’ont pas de droit de suite. Un journaliste pose une question, François Hollande répond, et on passe à une autre question. Il faudrait peut-être donner la possibilité au journaliste qui a posé une question de pouvoir en faire le service après-vente.
Et sur la forme, comment avez-vous trouvé François Hollande ?
Je lui ai trouvé un ton un peu grave. Il a fait un peu d’humour, mais il n’en a pas abusé. Et puis il l’a dit lui-même : il n’avait ‘pas de temps à perdre’ ! La conférence devait durer deux heures, elle a duré deux heures. Pour une fois fois, tout était minuté.