Crise du porc : une table ronde exceptionnelle prévue lundi

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CRISE DU PORC - Le président du Marché du porc breton a annoncé la tenue d'une table ronde avec l'ensemble des acteurs de la filière lundi, après que les deux poids lourds du secteur ont encore boycotté la cotation de vendredi.

Arriveront-ils à renouer dialoguer alors qu'ils s'ignorent depuis une semaine ? Les différents acteurs de la filière porcine tenteront en tout cas de se reparler lundi, lors d'une table ronde, a annoncé vendredi le président du Marché du porc breton (MPB) Daniel Picart. "Une table ronde sera organisée lundi" avec l'ensemble des acteurs de la filière, a-t-il déclaré, avant d'ajouter : "l'ensemble des abattoirs sont conviés à cette table ronde, y compris Bigard et la coopérative Cooperl".  Il y a urgence : la cotation des ventes de porcs a de nouveau été suspendue vendredi après le nouveau boycott de ces deux entreprises qui sont les plus gros acheteurs de la filière.

Bigard et Cooperl poursuivent la politique de la chaise vide. Comme lundi et jeudi, les société Cooperl et Bigard/Socopa ont une nouvelle fois refusé de participer vendredi au marché du porc breton (MPB), qui fait office de référence pour la fixation des prix en France. Résultat, le marché français du porc est une nouvelle fois bloqué. En effet, à eux deux, Cooperl et Bigard représentent 30% des achats de porcs sur le MPB. Leur absence modifie donc significativement l'équilibre entre offre et demande et empêche la fixation d'un prix représentatif de l'état du marché. Or le prix fixé au MPB fait office de référence pour tout le pays. Si bien que les producteurs se retrouvent avec des animaux prêts à partir à l'abattoir mais qu'ils ne peuvent pas vendre.

Pourquoi Cooperl et Bigard refusent-ils de participer à ce marché ? Ils savent qu'ils sont attendus au tournant pour vérifier s'ils respectent la promesse de toute la filière de ne pas acheter de porc en-dessous des 1,40 euro le kilo. Un prix qui a été décidé en juin dernier, après un nouveau mouvement de grogne des éleveurs. Sauf que si les éleveurs estiment ne pouvoir survivre qu'à partir de 1,40 euro le kilo, les abattoirs et les industriels jugent ce tarif trop élevé pour eux. Surtout quand le porc espagnol et allemand se vendent à 1,26 et 1,38 euro le kilo. Les points de vue de chacun sont donc difficilement conciliables, surtout lorsqu'on sait que l'Organisation Nationale des Eleveurs de Porcs réclame un tarif de 1,60 euro le kilo.

Une table ronde pour quoi faire ? Ce différend sera à nouveau au coeur des discussions de lundi. Et le gouvernement suit le dossier de près : "il y a aujourd'hui urgence à trouver de bonnes solutions en lien avec la filière et le ministre de l'Agriculture (Stéphane Le Foll), qui a toute ma confiance, suit ce dossier et recevra l'ensemble des acteurs autant que nécessaire", a déclaré le Premier ministre vendredi lors d'un déplacement à Avignon.

Mais les leviers que le gouvernement peut activer sont limités. La première solution, inciter tous les acteurs à accepter une hausse des prix, n'a pas porté ses fruits, le secteur agroalimentaire arguant que cela revient à renchérir un prix du porc français déjà supérieur à celui de ses voisins espagnols et allemands. L'autre solution, proposée par le président de l'Union des groupements de producteurs de viande en Bretagne, Michel Bloc'h, n'est pas plus aisée à mettre en place. Ce dernier a demandé, vendredi matin sur RTL, que "les charges sociales qui pèsent sur les salariés de l'agroalimentaire soient diminuées". Il estime qu'en attendant que l'Union européenne se penche sur cette question "il faut que l'Etat français aide directement les entreprises". "Les coûts sociaux sont d'un rapport de 1 à 3 entre la France et l'Allemagne et entre la France et l'Espagne, on ne peut pas jouer sur un même terrain de jeu quand les règles sont différentes à un tel niveau", a-t-il poursuivi jugant que "c'est l'ensemble du secteur porcin qui est en grave danger aujourd'hui".

Si l'on prend en compte l'instauration d'un Smic horaire en Allemagne et les allègements de charges prévus dans le pacte de responsabilité en France, "le coût horaire au niveau du Smic sera de 10,20 euros pour France et il sera en Allemagne de 10,28 euros. On a donc réussi à rattraper le retard", a répliqué le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll sur Europe 1. Mais les producteurs français pourront-ils patienter assez longtemps pour que l'ajustement se fasse ?