Le système fiscal et les prélèvements sociaux ont permis d'éviter une hausse des inégalités en France depuis 30 ans, selon une étude publiée mardi par le Laboratoire sur les inégalités mondiales (WIL). Avant impôts, les écarts ont augmenté, la part des revenus des 10% des Français les plus riches passant de 30% à 32% entre 1990 et 2018, alors que celle des 50% les plus modestes a diminué de 24% à 22%, selon ce travail réalisé par une équipe de cinq économistes, dont Thomas Piketty, auteur du livre à succès Le Capital au XXIe siècle.
Mais "les prélèvements et les transferts ont totalement absorbé l'augmentation des inégalités avant impôt en France, conduisant à la stabilité des inégalités de revenu disponible", ont relevé les chercheurs. "La progressivité du système socio-fiscal (impôts et prélèvements sociaux) a fortement augmenté depuis 25 ans grâce à l'allègement des cotisations sociales sur les bas salaires", a expliqué Jonathan Goupille-Lebret, l'un des cinq auteurs.
Les inégalités ont fortement augmenté aux États-Unis. Les impôts réduisent pourtant moins les inégalités en France qu'aux États-Unis. Dans ce dernier pays préalablement examiné par des économistes du même laboratoire, les écarts de revenu sont réduits de 34% par la fiscalité, contre seulement 24% dans l'hexagone. Mais malgré un système plus redistributif, "les inégalités de revenu ont été fortement croissantes" depuis trois décennies outre-Atlantique.
"On voit que les inégalités avant impôts en France et aux États-Unis ont augmenté depuis ces 25 dernières années, mais la hausse a été plus forte aux États-Unis", pointe Jonathan Goupille-Lebret. En France, le poids des taxes indirectes comme la TVA, est plus important. Au final, les écarts sociaux moins accentués en France qu'aux États-Unis s'expliquent surtout par des facteurs non fiscaux, comme un accès plus large à l'université et au système de santé et "le fait qu'il y a un Smic et des négociations salariales qui limitent l'envolée des inégalités de revenu", souligne le chercheur.