L'agriculture vend à perte : "On travaille pour la gloire"

© OLIVIER MORIN / AFP
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Théo Maneval, édité par Anaïs Huet , modifié à
Alors que les sénateurs s'apprêtent à plancher sur la loi agriculture et alimentation, les éleveurs les interpellent sur leur situation, et leur impossibilité de se dégager un salaire.

L'examen de la loi agriculture et alimentation arrive mardi au Sénat. Les membres de la chambre haute vont devoir se pencher sur une épineuse question : comment garantir enfin des prix qui permettent à nos agriculteurs de vivre.

"On ne se rémunère pas". Selon le dernier rapport annuel de l'Observatoire des prix et des marges des produits alimentaires, publié le 22 juin, la quasi-totalité des filières agricoles vend en-dessous de ses coûts de production, et ne peut pas se dégager de salaire. Pour les éleveurs bovins en particulier, la situation est catastrophique. Depuis 11 ans qu'elle travaille sur l'exploitation familiale en Seine-et-Marne, Sophie de Rieux, une éleveuse rencontrée par Europe 1, n'a jamais connu un prix de vente de la viande de ses vaches qui arrive à la hauteur de ses coûts de production. Elle n'a même jamais de quoi se dégager une vraie rémunération. "On travaille pour la gloire. On travaille pour nos vaches, parce qu'on aime ce métier, mais on ne se rémunère pas", constate-t-elle amèrement.

S'imposer face à la grande distribution. "En ce moment, on vend une vache 3,60 euros le kilo de carcasse. Il faudrait qu'on la vende 4,50 euros pour qu'on puisse vivre de notre travail", précise-t-elle. Alors pour Sophie comme pour les autres éleveurs, la situation n'a que trop duré. "Il faut que ça change", insiste l'agricultrice. "Et il faut que ça passe par la loi pour imposer quelque chose aux grandes surfaces. Nous, on n'arrive pas à négocier avec eux", déplore-t-elle.

 

Pas d'outil de contrôle prévu. Le texte porté par le ministre de l'Agriculture, Stéphane Travert, prévoit justement de calculer les prix à partir des coûts de production des agriculteurs ou encore d'encadrer les promotions excessives dans les magasins. Un pas en avant, certes, sauf qu'il n'y a pas d'outil de contrôle prévu à ce stade. "Bien sûr que l'on demande des sanctions. Quand la loi établit une règle, elle doit avoir le souci de la faire respecter. On ne demande pas la lune, juste que nos produits soient rémunérés au prix qu'ils nous coûtent à les produire", insiste le président des Jeunes Agriculteurs, Jérémy Decerle, au micro d'Europe 1.

Et il faut aller vite, lancent les éleveurs aux sénateurs : les prochaines négociations sur les prix commenceront au mois d'octobre.