Le gouvernement a annoncé jeudi une batterie de mesures pour répondre à la crise agricole. Un plan d'aide dont le montant total avoisine les "3 milliards d'euros en 3 ans", dixit Manuel Valls, et qui recouvre de nombreuses mesures. Les agriculteurs ont donc été écoutés. Il faut dire qu'ils avaient mis les moyens : plus d’un millier de tracteurs ont débarqué jeudi matin dans les rues de la capitale. Mais les mesures ne convainquent pas tout à fait les manifestants.
Les principales informations à retenir
• 1.365 tracteurs, 91 bus et une cinquantaine de véhicules légers se sont rassemblés à Paris. Ces convois n'ont pas pour autant provoqué d'importantes perturbations du trafic routier.
• La profession est malmenée depuis près de deux ans. En cause ? La baisse des prix, l'embargo russe et une féroce concurrence
• Le Premier ministre a dévoilé une série de mesures pour un montant de 3 milliards
Une manifestation difficile à ignorer. Parce que le nombre fait la force, les deux organisations syndicales à l’origine de cette mobilisation – la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs – ont décidé d’y mettre les moyens : fin août sur Europe 1, Xavier Beulin, président de la FNSEA, annonçait "entre 1.000 et 1.500 tracteurs sur Paris". Et le compte y est : jeudi vers 13 heures, la préfecture comptabilisait 1.580 tracteurs et 91 bus, tandis que la FNSEA parlait de plus 1.700.
De nombreux jeunes agriculteurs étaient venus du Grand Ouest, très touché par les crises laitière et porcine. Sur les tracteurs, souvent décorés de drapeaux bretons, les slogans étaient éloquents, à grands renforts de pétards et klaxons: "La mort est dans le pré", "Qui sème la misère récolte la colère", "Nos charges nous tuent", "Convoi de la dernière chance". En fin d'après-midi, une partie des tracteurs a commencé à quitter la place de la Nation.
Le gouvernement promet 3 milliards. En réaction, Manuel Valls a promis en début d'après-midi une nouvelle série d'aides aux agriculteurs en difficulté, permettant selon lui de répondre aux besoins d'investissement de la filière. "C'est un message d'amour, c'est un message fort et sincère: vous avez le soutien de la Nation", a lancé le Premier ministre. L'exécutif a prévu une rallonge de 85 millions d'euros par rapport au plan d'urgence dévoilé en juillet, sous forme d'effacements et d'allègements de cotisations et charges sociales. Il a aussi promis une "pause" dans les normes, notamment environnementales, imposées aux agriculteurs, ainsi qu'une "année blanche" en 2015 pour le remboursement des dettes bancaires des agriculteurs en difficulté qui en feront la demande. Enfin, les aides versées par l'État, les régions et l'Union européenne seront portées "à 350 millions d'euros par an pendant trois ans". En intégrant un effet de levier financier, cela doit permettre selon le gouvernement d'atteindre un milliard d'euros par an, donc trois milliards sur trois ans.
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Des mesures qui ne séduisent pas tout le monde. Ces annonces correspondent assez précisément aux grandes revendications détaillées par la FNSEA, 1er syndicat agricole, à l'origine de la mobilisation. Son président Xavier Beulin a d'ailleurs estimé que le gouvernement avait "entendu" le message des agriculteurs et leur "demande de considération".
Mais son compte-rendu de la réunion avec Manuel Valls, depuis le podium installé place de la Nation, a suscité les huées de manifestants, surtout des plus jeunes agriculteurs, très remontés et déçus. "Vendu!", "Démission!", "On va mettre le feu!", ont réagi certains d'entre eux, surtout bretons. "On n'a rien obtenu, pas de prix, aucune garantie", s'est énervé auprès de l'AFP, Christophe Le Tyrant, éleveur de porcs dans les Côtes-d'Armor. "On a une 'année blanche', mais ça ne résout rien. A la fin de l'année, on devra bien les payer, les traites." A la tribune, des membres des Jeunes Agriculteurs (JA) du Finistère ont souhaité se rendre sur les Champs-Élysées.
Des perturbations limitées. Les perturbations n'ont pas été aussi importantes que redoutées, notamment parce que les automobilistes avaient anticipé. Peu après 8 heures, un bouchon de 8 kilomètres était relevé sur l'autoroute A1, un autre de 3 km sur l'A4. Le CNIR relève "beaucoup moins de voitures sur les routes" que d'ordinaire: "Les usagers étaient prévenus et ont pris leurs dispositions".