Ils n’ont pas bloqué les principaux abattoirs français pendant trois jours pour rien. En guerre pour obtenir le juste prix de leur travail, les éleveurs bovins ont été entendus : lors d’une réunion au ministère de l’Agriculture, la grande distribution a accepté le principe d’une légère augmentation des tarifs. Mais le dossier est loin d’être clos, si bien que tous les acteurs de la filière ont décidé de se retrouver mi-juillet autour de la table des négociations.
Quand l’élevage bovin n’est plus rentable. Comme dans la filière porcine, les éleveurs de bovins se battent depuis des mois pour obtenir de meilleurs tarifs. Car la guerre des prix et la concurrence étrangère ont fait des ravages dans le secteur : la viande est payée en moyenne 3 euros à 3,40 euros aux producteurs, un tarif qui les empêcherait de rentrer dans leurs frais. "A ce prix-là, les éleveurs ne gagnent rien et ne couvrent même pas les coûts de production, c'est insupportable. Il faudrait au minimum une augmentation de 60 centimes par kilo/carcasse", a souligné Xavier Beulin, président de la FNSEA, mercredi soir sur Europe 1. En attendant, les éleveurs disent perdre en moyenne 250 euros par vache et ont vu leurs revenus passer sous la barre des 1.000 euros par mois, de quoi les inciter à hausser le ton.
Les abattoirs bloqués pour faire pression. Le dialogue avec le principal acheteur de la filière, la grande distribution, reste néanmoins difficile : ces derniers font pression pour obtenir les prix les plus bas et ont un pouvoir de négociation renforcé depuis que les grandes chaines ont décidé de fusionner leurs centrales d’achat. Les éleveurs ont donc décidé d’investir la rue pour riposter : depuis dimanche, 4.000 d’entre eux bloquaient les principaux abattoirs français. Une méthode visiblement payante puisque le ministre de l'Agriculture a convoqué tous les acteurs de la filière, mercredi.
5 centimes de plus par kilo, en attendant mieux. Grâce à la médiation du ministère de l’Agriculture, éleveurs, grande distribution, abattoirs et industrie agroalimentaire ont réussi à se mettre d’accord sur une augmentation graduelle des tarifs : "une revalorisation des prix payés aux producteurs de 5 centimes par semaine, renouvelée chaque semaine pour arriver à couvrir les coûts de revient qui sont en moyenne de 4,50 euros le kilo/carcasse", dixit Jean-Pierre Fleury, président de la fédération nationale bovine (FNB).
Mais pour les éleveurs, cet engagement à court terme ne résout pas tous les problèmes et ne représente qu’une étape. Pour la FNSEA, les éleveurs bovins ne rentreraient dans leurs frais qu'à partir du hausse de "60 centimes" par kilo. Si le blocage des abattoirs est "suspendu", les éleveurs ont donc néanmoins décidé de maintenir la pression : "c'est une suspension des blocages avec mise sous surveillance des opérateurs de la filière, grande distribution et industriels, pour vérifier le respect des engagements", a prévenu Jean-Pierre Fleury.
Une information transparente, l’autre levier. La grande distribution n’est pas la seule en cause dans la fixation des prix de la viande bovine. Le consommateur final a lui aussi un rôle à jouer, mais encore faut-il qu’il dispose d’une information claire pour faire ses choix. Le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a donc encouragé la grande distribution à mettre en avant dans ses rayons l'origine et l'étiquette "Viande de France", une pratique pas encore assez répandue.
Une transparence de l’information qui reste à améliorer au sein même de la filière aussi : Interbev, l'interprofession du bétail et des viandes, a promis de continuer de travailler sur "la clarification des cotations". Tous les acteurs de la filière doivent se retrouver mi-juillet pour faire un point d’étape, avant une nouvelle réunion, le 1er septembre.