Les loueurs de voitures (aussi) soupçonnés d'entente sur les prix

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Gabriel vedrenne avec AFP
DANS LE VISEUR -

L'Autorité de la concurrence a ouvert une enquête sur les loueurs de voitures : elle les soupçonne de s'être mis d'accord pour éviter une guerre des prix.

La liste commence sérieusement à s'allonger : après les yaourts, les endives, la nourriture pour chiens ou plus récemment les producteurs de volaille, c'est au tour des sociétés de location de voitures de se retrouver dans le viseur de l'Autorité de la concurrence. Cette dernière a annoncé avoir ouvert une enquête sur ce secteur, soupçonnant les principales sociétés de s'être entendues sur les tarifs dans les gares et les aéroports. Des pratiques anticoncurrentielles qui, si elles sont avérées, signifieraient que de nombreux consommateurs n'ont pas payé "le juste prix" pendant des années.

Quels loueurs sont concernés ? Tous les poids lourds du secteur seraient concernés : Europcar, Avis Budget, Hertz, Citer, Sixt et Ada, d'après Le Figaro qui a révélé l'information. C'est à dire les seuls réseaux présents dans la plupart des grandes gares et des aéroports.

Qu'est-il reproché aux loueurs de voitures ? Le gendarme de la concurrence les soupçonne ne pas avoir respecté le libre jeu de la concurrence, censé permettre au consommateur d'obtenir le meilleur prix. Au lieu de cela, les loueurs sont accusés de s'être mis d'accord entre eux de 2003 à 2008 pour aligner leurs tarifs dans certaines situations : la surcharge dans les gares ferroviaires et les offres commerciales dans les aéroports.

Le premier volet, concernant la surcharge dans les gares ferroviaires, concerne une période allant de 2005 à 2008. Selon une source proche du dossier, il s'agit du volet le plus important de l'enquête. Le volet concernant les aéroports remonte à 2003-2008, selon le document financier d'Europcar. Les "échanges d'informations" auraient eu lieu dans une douzaine d'aéroports français, dont ceux de Roissy et d'Orly.

Pointés du doigt, les loueurs n'ont pas tous adopté le même ton. Le directeur général d'Ada, Christophe Plovenez, a ainsi assuré à l'AFP que sa société n'était concernée "que par l'un des deux volets, celui des aéroports". Mais du côté d'Europcar, on conteste "formellement les griefs qui lui ont été notifiés", précisant défendre "très fortement cette position auprès de l'Autorité de la concurrence".

Que risquent les sociétés ? Si les soupçons  de l'Autorité de la concurrence se confirment, les entreprises en question risquent une lourde amende. Europcar, numéro un de la location de voitures, a ainsi précisé avoir provisionné 45 millions d'euros en vue d'une amende possible. Une somme conséquente mais qu'il toujours rapprocher des profits "illégitimes" réalisés pendant la même période : parfois, le gain permis par une entente peut être supérieur à l'amende, qui peut aller jusqu'à 10% du chiffre d'affaire sur la période concernée.

Mais, depuis peu, les entreprises redoutent surtout une autre menace : les actions de groupe, aussi appelées "class action". Ces dernières, introduites dans le droit français en octobre 2014, permettent à plusieurs consommateurs lésés de se mettre en groupe pour mener des poursuites. Or la justice peut leur accorder que l'entreprise fautive leur rembourse le trop-perçu, ce qui devient financièrement beaucoup plus sérieux, d'autant plus si on y ajoute les frais de procédure.

De plus en plus d'entreprises condamnées. Les entreprises sont-elles de plus en plus tentées de ne pas respecter la loi ou l'Autorité de la concurrence est-elle tout simplement plus efficace ? Toujours est-il que les condamnations pour entente sur les prix se sont multipliées ces derniers mois. Le 12 mars, le gendarme de la concurrence a condamné 11 groupes laitiers dont Senagral, Novandis (Andros) ou Lactalis à des amendes d'un total de 192,7 millions d'euros pour entente sur les prix et les appels d'offres sur des produits laitiers frais portant des marques de distributeurs.

Le 6 mai, 21 industriels du secteur de la volaille dont LDC (Loué, Le Gaulois ...), Duc et Gastronome, et deux fédérations professionnelles, ont été condamnés pour une entente, écopant d'une amende globale de 15,2 millions d'euros. Dans un autre genre, le secteur de la croquette animale a été condamnée en 2012 à 35,3 millions d'euros pour restriction de concurrence. La même année, le cartel de l'endive était mis à l'amende, tout comme, quelques mois plus tôt, celui des lessives.