Le taux du livret A sera fixé à 0,75% le 1er août prochain. La décision a été annoncée lundi par le ministère des Finances, qui a suivi la recommandation de la Banque de France. L'effet sur les finances des ménages sera marginal : en prenant en compte un Livret A type, dont l'encours moyen atteignait 4.092 euros fin 2014, la baisse du taux de 1% à 0,75% va représenter un manque à gagner de 10,23 euros en année pleine. Il n'empêche : c'est la première fois que le célèbre placement passe sous le seuil symbolique de 1%.
Quand le taux atteignait 8,5%... Le livret A (61 millions d'épargnants) n'en finit plus de perdre en rentabilité. À 1%, son taux était déjà à son niveau le plus bas depuis sa création en 1818. Il avait frôlé ce plafond en 2009, où il était descendu à 1,25% avant de remonter légèrement. Son point culminant (8,5%) avait été atteint en 1981. L'inflation grimpait alors, elle aussi, au sommet, dépassant les 13%. Le taux avait ensuite entamé une érosion fulgurante, avant de remonter à 4% en 2008 et de redescendre ensuite de manière presque continue.
>> Les taux du livret A et de l'inflation depuis 1981 :
Comment est calculé le livret A ? En théorie, si la formule permettant son calcul avait été respectée, la rémunération du produit d'épargne le plus répandu en France, créé en 1818, aurait dû baisser à 0,50% en août prochain. Mais, comme il en a la possibilité, le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, a choisi d'y déroger et de proposer un repli plus limité. La formule de calcul du taux fait appel au niveau de l'inflation (hors tabac), majoré de 0,25 point. Or, en juin, les prix à la consommation ont progressé sur un an de 0,3%, selon les données publiées la semaine passée par l'Insee. Ce qui donnait en théorie 0,50%, puisqu'il faut arrondir au quart de point le plus proche.
Les gouvernements se sont-ils souvent éloignés de cette formule ? Cette formule de calcul suivant l'inflation n'existe que depuis 2004. "Auparavant, les gouvernements ajustaient le taux du livret A comme ils l'entendaient, plus ou moins en fonction de critères économiques qu'ils ne se donnaient pas toujours la peine d'expliquer", décrypte pour Europe 1 Philippe Crevel, directeur du Cercle de l'épargne. Depuis 2004, il est arrivé à plusieurs reprises que les gouvernements s'éloignent de l'inflation, à la hausse comme à la baisse. Lors des deux dernières révisions, le gouvernement avait résisté à sa baisse sous le seuil de 1%, alors que la Banque de France avait proposé à chaque fois de la ramener à 0,75%. En 2009 déjà, Nicolas Sarkozy avait refusé une baisse en dessous de 1,25%, alors que l'inflation stagnait à 0,25%.
A l'inverse, "vers 2010/2011 et en 2007, le gouvernement n'avait pas sur-réagit à la hausse de l'inflation, en autorisant une hausse limitée du taux", se souvient Philippe Crevel. Un placement comme le livret A n'est en effet pas prévu pour une rémunération trop élevée par rapport à l'inflation. Rémunérer les épargnants coûte de l'argent aux banques, qui en ont, de fait, moins pour investir dans l'économie. En outre, cela coûte cher aux bailleurs sociaux : l'argent du livret A est principalement destiné à financer les logements sociaux. Et si emprunter coûte trop cher aux bailleurs, ils construisent moins.