EDF affirmait la semaine dernière qu'il n'y avait aucun problème sur l'avancée de l'EPR de Flamanville, alors que même l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) n'a toujours pas donné son feu vert à la cuve qui présente une trop forte concentration de carbone. Mercredi, dans une interview au Figaro, le président de l'Autorité de sûreté nucléaire, Pierre-Franck Chevet se montre beaucoup moins rassurant. Depuis les anomalies découvertes sur cette cuve, "nous sommes allés de mauvaises de surprises en mauvaises surprises", affirme-t-il, faisant référence aux douze réacteurs nucléaires arrêtés pour des contrôles sur les générateurs de vapeur.
La sûreté des pièces en question. Pierre-Franck Chevet souligne les "pratiques inacceptables" à l'usine d'Areva au Creusot, en Saône-et-Loire, depuis le début des années 1960 : "400 dossiers 'barrés', volontairement cachés au client et à l'ASN, portant sur des anomalies". En effet, les équipes d'Areva ont tenu une sorte de double comptabilité sur les normes techniques des pièces, qui sont actuellement installées dans nos centrales. D'un côté, il y avait les documents envoyés à l'Autorité de sûreté nucléaire avec les normes exigées. De l'autre, les vrais documents où sont inscrites les vraies normes techniques appliquées lors de la fabrication des pièces, ces fameux "documents barrés" qui n'auraient jamais été validés par l'ASN. À ce jour, 50 personnes travaillent chaque jour à vérifier si les vraies normes découvertes remettent en cause ou non la sûreté des pièces.
"La situation est très préoccupante". Entre les difficultés économiques d'EDF et d'Areva ainsi que les problèmes techniques, "la situation est devenue très préoccupante" pour la filière nucléaire française, estime Pierre-Franck Chevet. Selon le patron de l'ASN, il est nécessaire de repenser toute la chaîne de contrôle, ce qui devrait prendre plusieurs mois.