Le groupe Peugeot-Citroën espérait qu’on parle lundi de son rachat d’AramisAuto, un revendeur d'automobiles spécialisé dans le numérique. C’est raté : le constructeur automobile fait davantage la Une pour sa gestion des effectifs. Un document interne qu’Europe 1 a pu consulter fait état de quelques 2.000 suppressions de postes prévues en 2017 chez PSA, provoquant l’indignation de la CGT. Pourtant, si le problème de l’emploi dans le secteur automobile se pose, cette annonce n’est pas une surprise.
PSA va bien supprimer des postes. Dans un épais document interne qui sert de document de travail pour le Comité central d’entreprise organisé ce lundi, la direction prévoit effectivement des suppressions de poste. Mais ce terme n’est pas officiellement employé puisque le groupe automobile va recourir à des méthodes indirectes : le "congé senior" et la "mobilité externe sécurisée". La direction dément donc toute suppression de poste. Dans le détail, 983 employés devraient bénéficier du premier dispositif – un départ en préretraite - et 1.025 du second dispositif – des départs volontaires. Au total, ce sont donc 2.008 employés qui devraient quitter l’entreprise au cours de l’année 2017, auxquels s’ajoutent 125 salariés bénéficiant de "congés de longue durée".
Des suppressions de postes prévues et acceptées. L’annonce de ce nouveau plan n’est pas une surprise : il avait déjà été annoncé en juillet et, surtout, il a reçu l’accord de tous les syndicats, à l’exception de la CGT. L’entreprise a en effet prévu des conditions de départ très favorables et souligne qu’elle s’est engagé à 1.000 embauches en CDI d’ici 2019 et qu’elle va continuer à prendre 2.000 jeunes en alternance ou en stage. Sur le papier, les arrivées compenseraient donc à peu près les départs, argumente la direction. Ce renouvellement des effectifs permet à la fois de compenser le départ des baby-boomers et l’acquisition de nouvelles compétences.
Les conditions dans lesquelles ces 2.000 suppressions de postes sont prévues expliquent pourquoi le ton est mesuré parmi les syndicats mais aussi du côté de l’Etat, actionnaire à hauteur de 14%. Ce n'est "pas un nouveau plan social", simplement des "départs sur la base du volontariat" comme convenu dans l'accord social triennal conclu en juillet avec les syndicats majoritaires, a ainsi rappelé Franck Don pour la CFTC. Force Ouvrière souligne, de son côté, les engagements de PSA vis-à-vis des plus jeunes. Au final, seule la CGT, qui n’a jamais accepté cette feuille de route, est montée au créneau lundi pour dénoncer un plan "inacceptable et totalement injustifié". Un cri d’alarme qui, hasard du calendrier, intervient le jour même où François Hollande revient à Florange pour vanter l’action de l’Etat dans le dossier ArcelorMittal.
Sur le moyen terme, PSA réduit bien la voilure. Au-delà de la polémique actuelle, la tendance est néanmoins claire : le groupe automobile a sensiblement réduit ses effectifs au cours des dernières années, après être passé pas loin du gouffre et avoir été sauvé par l’Etat français et le constructeur chinois Dongfeng. Ainsi, alors que le groupe automobile employait près de 100.000 personnes en 2005, ce nombre est passé à un peu plus de 65.000 en 2015, soit une baisse des effectifs de 33% en une décennie.
Pourquoi une telle baisse des effectifs ? L’industrie automobile a de nombreuses raisons de vouloir réduire la voilure en France, qui tiennent autant à l’évolution du marché français qu’à ses choix stratégiques. Le secteur a dû d’abord faire face à des surcapacités de production en France, et en Europe plus généralement : le continent fabrique plus de véhicules qu’il n’est capable d’en acheter. Ajoutez-y la concurrence grandissante des marques étrangères et vous comprendrez pourquoi les constructeurs ont décidé de lever le pied en Europe, surtout après la crise de 2008 qui a fait chuter les ventes. C’est ainsi que PSA a décidé de fermer le très symbolique site d’Aulnay-sous-Bois en 2014.
Mais les constructeurs ont également organisé leur désinvestissement d’Europe en multipliant les sites dans d’autres pays, en suivant un double pari : s’installer là où vivent les consommateurs de demain, mais aussi là où les coûts de production sont bien moins élevés que dans l’Hexagone. Renault a ainsi misé sur l’Espagne, la Slovénie et la Turquie. Résultat, une partie des véhicules produits à l’étranger sont vendus en France et privent les usines françaises d’activité. Sans oublier que la robotisation des chaines de production se poursuit et nécessite moins d’employés pour réaliser la même tâche, tandis que l’essor de la sous-traitance a permis aux groupes automobiles "d’externaliser" une partie de leur masse salariale. Autant de raison qui font que PSA et Renault réduisent leurs effectifs depuis une décennie.