La nouvelle procédure prud'homale, mise en place par la loi Macron de 2015, a fait chuter le nombre de nouveaux recours des prud'hommes de plus de 30% dans certaines régions. Le constat a été dressé vendredi par des conseillers prud'homaux, qui déplorent l'obligation de faire des saisines écrites. Depuis le 1er août 2016, une personne doit en effet, pour saisir les prud'hommes, remplir une requête écrite, accompagnée d'un bordereau listant les pièces invoquées à l'appui de sa saisine, en vertu de la loi "croissance et activité" adoptée en 2015 et défendue à l'époque par Emmanuel Macron, alors ministre de l'Économie.
"35% de saisines en moins". Au conseil de prud'hommes de Bobigny, "on a 35% de saisines en moins depuis cette date", a indiqué sa vice-présidente (CGT), Jamila Mansour, lors d'une table ronde organisée par l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis). Selon elle, "cet effondrement" est "consécutif à la nouvelle procédure Macron". Frédéric Sicard, avocat du travail côté employeurs et bâtonnier de Paris, a lui aussi constaté "des baisses de contentieux de 30% sur certaines régions", citant notamment les Hauts-de-France. "Moins 30% de contentieux, c'est très inquiétant", a-t-il ajouté.
La situation préoccupe aussi Bruno North, président (Medef) de la section encadrement des prud'hommes de Paris : "À partir du moment où on met de plus en plus de formalisme, on a le sentiment, à tort ou à raison, qu'il y aura une justice des puissants et des misérables, les puissants qui pourront faire une belle requête, et ceux qui ne pourront pas faire aussi précisément cette requête et qui seront traités en fonction de ce qu'ils auront fourni."
Des justiciables "découragés par la procédure". Pour Jamila Mansour, la baisse des recours résulte du fait que "des justiciables sont découragés par la procédure". À Bobigny, "le greffe, à l'accueil, nous a tout de suite alertés là-dessus, en disant qu'il y a un certain nombre de salariés qu'ils ne revoient pas et qu'ils ont constaté un découragement immédiat", a-t-elle rapporté.
"Toutes ces personnes, elles repartent avec leurs problèmes, leurs questions, avec le sentiment, à tort ou à raison, qu'elles ont subi une injustice. C'est très dangereux dans une société de laisser des personnes ne pas pouvoir accéder à un juge sur un problème qui est, pour eux, fondamental", a-t-elle mis en garde. "La Chancellerie est au courant depuis de nombreux mois, mais rien n'est fait", a-t-elle dénoncé, réclamant "de revenir à l'ancienne procédure".