Impôts : quand Bercy chasse les fraudeurs sur les réseaux sociaux

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Alexandra Thery avec Roland Perez

Poster sur internet des photos de ses vacances, de ses soirées ou encore de ses objets personnels, cela peut paraître anodin. Pourtant, les services de Bercy vont bientôt traquer les fraudeurs du fisc sur les réseaux sociaux. La Cnil, la Commission nationale informatique et libertés, craint que cette mesure ne "porte atteinte à la liberté d’expression et d'opinion".

Facebook, Instagram ou encore Le Bon Coin, nouvelle arme de lutte contre la fraude fiscale ? C'est en tout cas ce que le gouvernement souhaite expérimenter pendant trois ans. Un article du projet de loi de finances pour 2020 instaure la possibilité pour l'administration fiscale de collecter les données sur les réseaux sociaux pour appuyer les enquêtes pour fraude.

Des algorithmes pour chasser la fraude fiscale

Grâce à un logiciel informatique, le gouvernement va pouvoir passer au crible tout ce que l'on publie sur les réseaux sociaux, les sites de vente en ligne ou encore les forums. "Cela pourra figurer au dossier du contribuable qui devra fournir des explications pour contester d’éventuels redressements", explique notre chroniquer et avocat Roland Perez. Ainsi, un internaute qui s'afficherait aux côtés d'une Ferrari, avec d'une montre de luxe, ou voyageant dans le monde entier mais qui ne déclare pas grand-chose aux impôts, pourrait ainsi devenir suspect.

La CNIL craint pour la liberté d'expression

Dans un avis rendu le 30 septembre dernier, la Commission nationale informatique et libertés a émis de nombreuses réserves face au logiciel mis en place pour croiser les données des contribuables et ainsi vérifier la cohérence des déclarations grâce aux publications sur les réseaux sociaux. L'organisation met en garde contre une possible "atteinte particulièrement importante au droit au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel". 

Le texte prévoit de conserver pour une durée maximale d'un an les données de nature à concourir à la constatation d'infractions, voire pendant toute la procédure en cas de poursuites pénales, fiscales ou douanières.

La mort des réseaux sociaux pour certains contribuables ?

"Certains vont purement et simplement disparaître des réseaux", fait savoir Roland Perez et "les plus astucieux vont peut-être configurer les paramètres d’accès de leurs comptes en privé. Mais rien ne dit que le logiciel n’y aura pas accès" prévient l'avocat.

Si Bercy assure avoir prévu des "garde-fous", ce sera in fine au Conseil d'Etat de trancher. Il devra fixer les modalités d'application du nouvel arsenal fiscal et vérifier qu'il respecte les libertés fondamentales des contribuables.