Le Premier ministre a assuré mercredi que l'âge légal de départ à la retraite resterait fixé à 62 ans, mais il a aussi évoqué des "incitations" pour pousser les Français à rallonger leur carrière.
Dans son discours de politique générale, Edouard Philippe a confirmé que la réforme instaurant un système de retraite universel par points serait l'un des chantiers importants engagés dans les mois qui viennent, dans le prolongement de la présentation courant juillet des recommandations du haut-commissaire Jean-Paul Delevoye. Le gouvernement maintiendra "la possibilité d’un départ à 62 ans", a-t-il dit, mais les Français seront incités à travailler plus longtemps.
Il faudra distinguer l'âge légal d'un âge d'équilibre qui sera, lui, plus élevé. 64 ans ? 65 ans ? Le gouvernement se garde bien pour l'instant de lâcher un chiffre, mais en employant cette expression "âge d'équilibre", le Premier ministre donne une indication : il s'agira d'identifier l'âge à partir duquel la masse des départs à la retraite ne grèvera pas l'équilibre du régime. Les actifs qui accepteront d'attendre cet âge-là pour prendre leur retraite seront avantagés. C'est "l'incitation" dont parle Edouard Philippe. En clair : leur pension sera majorée, elle se verra appliquer une surcote.
Y aura-t-il, à l'inverse une décote pour les salariés qui ne voudront pas différer leur départ, et qui exerceront leur droit à la retraite dès l'âge légal, c’est-à-dire 62 ans ? Le Premier ministre n'a pas évoqué ce schéma mercredi. Il faut dire que le sujet est sensible, même s'il y a un précédent : depuis le début de cette année, les retraites complémentaires sont soumises à un bonus-malus. Les salariés qui partent dès 62 ans se voient appliquer un abattement de 10% sur leur pension pendant les trois premières années.
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60% des employeurs inquiets sur les capacités de salariés plus âgés
Cet allongement annoncé de la vie au travail inquiète 34% des salariés (tous âges confondus), et plus encore les dirigeants d'entreprises (60%), selon une étude Harris Interactive publiée jeudi par le groupe de protection sociale Malakoff-Médéric. Un grand nombre de salariés s’inquiètent en effet de ne pas pouvoir tenir le rythme sur le plan physique, mais pas uniquement, soupire Stéphane qui travaille chez SFR. "Evidemment, quand on travaille tard et qu’on est vieux, on est fatigué. La pénibilité augmente. Et puis, à 65 ans, il va être difficile de concurrencer les jeunes de 25 ans qui sortent d’école", relève-t-il auprès d'Europe 1.
L'inquiétude est encore plus vive du côté des employeurs. Avec des salariés plus âgés, les accidents et maladies professionnelles risquent d'augmenter, donc l'absentéisme. En même temps, nuance Sylvia qui dirige 50 personnes, il faut se méfier d'une approche simpliste. "Il y a des gens qui peuvent continuer, d’autres qui ne peuvent pas continuer. Ça dépend d’un parcours, d’un état de santé…", explique-t-elle. "Ça m’est arrivé de recruter quelqu’un qui avait 54 ans. Je ne vous cache pas que les ressources humaines sont venues m’interroger sur ce choix. Mais il avait des compétences et cette personne est allée au bout de sa carrière sur ce poste."
L'expérience, l'autonomie, la capacité à prendre du recul font partie des atouts que les employeurs voient chez les seniors. Mais, à l'opposé, il y a leur adaptation moins facile aux transformations de l'entreprise et leur difficulté à maîtriser les nouveaux outils et technologies.