C’est sans aucun doute l’un des plus gros chantiers du quinquennat d’Emmanuel Macron : la réforme du système de retraite se concrétise. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme, a donné jeudi le coup d’envoi d’une consultation citoyenne et dévoilé les détails du projet présidentiel. Dans un peu plus d’un an, il présentera son plan pour unifier les régimes de retraites et adopter un système par points. Europe 1 vous explique ce "big bang" qui concerne tous les Français.
Ce qui va changer
Le régime de retraite actuel est composé d’un régime général pour les salariés du privé, d’un régime pour la fonction publique et d’une trentaine de régimes spéciaux (SNCF, RATP, EDF, police nationale, marins…). Malgré cette diversité, le système actuel repose sur trois piliers : il est obligatoire, fondé sur la répartition (les actifs cotisent pour les pensions des retraités) et contributif (le montant de la pension dépend du niveau et la durée des cotisations du travailleur).
"Un principe d'égalité". Dès la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a annoncé sa volonté d’engager une refonte totale du système de retraites. Sa promesse : l’instauration progressive d’un "système universel de retraite" qui comprendrait "des règles communes de calcul des pensions" et fondé sur "un principe d’égalité : pour chaque euro cotisé, le même droit à pension pour tous". Le régime unique promu par Macron doit notamment permettre aux actifs de changer de secteur tout en conservant un système de cotisation unique.
L’objectif est qu’à carrière identique, revenu identique, la retraite soit identique
Concrètement, le chef de l’État souhaite mettre en place un régime de retraite par points, mission qu’il a confié à Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites. Le système par points, en vigueur dans tous les régimes complémentaires français mais aussi en Italie et en Suède, est assez simple : les actifs cotisent et accumulent des points tout au long de leur carrière. Au moment de partir à la retraite, ces points sont convertis en pension dont le montant dépend de la durée de cotisations et de la "valeur du point", déterminée par l’État.
"Le revenu donnera un droit à points, vous aurez une portabilité des droits quels que soient le type d’employeur et le secteur. L’objectif est qu’à carrière identique, revenu identique, la retraite soit identique", explique Jean-Paul Delevoye au Parisien. "L’objectif est d’arriver à un schéma simple : qu’il s’agisse d’un fonctionnaire, d’un salarié du privé ou d’un indépendant, s’ils gagnent la même somme d’argent pendant 40 ans, l’un et l’autre auront la même retraite. Le système par points s’appuiera uniquement sur la durée totale de carrière avec des règles identiques pour tous."
Ce qui reste pareil
Si on peut parler d’un big bang sur la forme, en revanche le fond du système ne change pas énormément : les cotisations resteront obligatoires et le principe de la répartition demeurera de manière à ce que les actifs payent les pensions des retraités. Durant la campagne, Emmanuel Macron avait assuré que le niveau des pensions ne baisserait pas avec la réforme. Reste la question de l’âge de départ à la retraite. "Dans un système à points, la notion de durée disparaît. C’est votre nombre de points qui vous permet un arbitrage personnel : j’ai assez de points, ma retraite me paraît suffisante, donc je pars", rappelle Jean-Paul Delevoye.
La durée de cotisation, critère essentiel. Mais, conformément à l’engagement d’Emmanuel Macron, "l’âge actuel de 62 ans devrait être conservé", assure le haut-commissaire à la réforme. "Nous pensons que si l’on supprime toute référence nous pouvons nous retrouver avec un certain nombre de personnes qui partiront plus tôt mais se retrouveront avec de toutes petites retraites." Un problème à la fois pour les individus concernés mais aussi pour la collectivité : moins d’années de cotisations, c’est moins d’argent pour verser les pensions de tous les retraités. C’est pourquoi "nous avons besoin de garder un seuil en-dessous duquel les actifs ne peuvent pas partir à la retraite pour éviter que cela pèse sur la solidarité nationale".
Enfin, le système par points voulu par Emmanuel Macron devrait tenir compte des soubresauts que peuvent connaître les travailleurs. "Cette réforme se fera à enveloppe constante ; elle maintiendra et consolidera les solidarités qui seront l’un des piliers du nouveau système : cela concerne les droits familiaux, la majoration pour enfants, les périodes d’invalidité, les séquences de chômage, les minima de pension et la pension de réversion", précise Jean-Paul Delevoye. Tous les arbitrages ne sont pas encore rendus, loin de là : la concertation avec les syndicats et la consultation citoyenne doivent durer jusqu’à la fin de l’année, en vue de l’élaboration d’un projet de loi mi-2019.