Le marathon budgétaire est particulièrement éprouvant en cette fin d'année 2018. Députés et sénateurs, qui s'échinaient déjà sur le projet de loi de finances (PLF) depuis des semaines, ont en effet dû composer avec les mesures d'urgence annoncées par Emmanuel Macron pour répondre aux revendications des "gilets jaunes".
Toutes ont un impact sur la trajectoire budgétaire française. Mais toutes ne sont pas dans le même texte. Certaines ont été intégrées au PLF, d'autres sont contenues dans un texte dédié, présenté mercredi en Conseil des ministres. Où en est-on exactement ? Europe 1 fait le point.
Une prime d'activité relevée de 100 euros qui s'ajoute au Smic
Qui y aura droit ? Emmanuel Macron avait promis que "le salaire d'un travailleur au Smic augmentera de 100 euros par mois dès 2019". Les modalités de cette augmentation, longtemps floues, puis fluctuantes, ont (enfin) été arrêtées dans le texte dédié aux mesures d'urgence et présentées mercredi en Conseil des ministres.
En réalité, c'est la prime d'activité, versée à un certain nombre de salariés qui gagnent jusqu'à 1,2 fois le Smic, qui sera augmentée. Une hausse de 100 euros, à laquelle il faut ajouter la revalorisation légale automatique du salaire minimum, d'environ 20 euros nets. Pour certains salariés au Smic, notamment les célibataires sans enfant, la hausse nette de leur revenu sera donc d'un peu plus de 100 euros. Mais d'autres devront se contenter de la revalorisation du Smic, car ils ne sont pas éligibles à la prime d'activité, versée en fonction des ressources du foyer et de sa composition (nombre d'enfants à charge). Le gouvernement a néanmoins décidé d'étendre la prime d'activité à 1,2 million de nouveaux ménages (jusqu'à 1,3 fois le Smic), pour atteindre les 5 millions de bénéficiaires.
Quand ? La date d'entrée en vigueur de la revalorisation du Smic est connue : comme tous les ans, ce sera au 1er janvier 2019. En revanche, pour voir sa prime d'activité gonflée, il faudra attendre un peu. Les personnes qui la perçoivent déjà l'auront le 5 février 2019. Les personnes qui ne la perçoivent pas aujourd'hui mais y ont droit, soit parce qu'elles n'avaient pas fait les démarches pour l'obtenir, soit parce qu'elles deviennent éligibles avec son extension, doivent absolument faire une demande le plus rapidement possible, entre le 1er et le 25 janvier, sur le site de la Caf, afin que ce soit effectif au 5 février.
La défiscalisation des heures supplémentaires dès janvier
Qui y aura droit ? Emmanuel Macron avait annoncé le 10 décembre des "heures supplémentaires sans impôts ni charges dès 2019" pour les salariés. Cette mesure est bien contenue dans le texte présenté mercredi en Conseil des ministres. Cocasse, quand on sait que des amendements en ce sens avaient été déposés par la droite sur le PLF… et rejetées par les députés LREM. "La majorité vote contre les annonces du gouvernement", avait d'ailleurs pointé l'élu centriste Charles de Courson.
Quand ? La désocialisation et défiscalisation des heures supplémentaires sera donc effective dès janvier 2019, avec un plafond fixé à 5.000 euros par an.
L'annulation de la hausse de CSG pour certains retraités en juillet
Qui y aura droit ? Face au tollé suscité par l'augmentation de la CSG pour les retraités aux revenus supérieurs à 1.700 euros mensuels, Emmanuel Macron avait annoncé le relèvement du seuil choisi à 2.000 euros. Autrement dit, la hausse de CSG sera annulée pour les retraités touchant entre 1.700 et 2.000 euros par mois.
Quand ? Cette disposition est contenue dans le projet de loi présenté mercredi. Mais elle n'entrera en vigueur qu'à l'été, "au plus tard au 1er juillet", a annoncé le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, mercredi. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il faut attendre la déclaration de revenus, faite au printemps, pour évaluer si oui ou non les retraités sont exonérés. Benjamin Griveaux a néanmoins précisé que l'exonération serait rétroactive. Si, à l'été, une personne se retrouve concernée par l'annulation de la hausse, le montant de celle-ci sur les premiers mois de l'année lui sera remboursé.
Les taxes sur le carburant gelées jusqu'en 2022
Promise par Emmanuel Macron, l'annulation des taxes sur le carburant censées entrer en vigueur au 1er janvier 2019 sera bien effective. Elle a été votée dans le PLF, examiné en seconde lecture par le Sénat mercredi après-midi. Ces taxes sont gelées jusqu'en 2022, ainsi que l'avaient souhaité les sénateurs avant même les annonces d'Emmanuel Macron.
Le chèque énergie bien étendu
Qui y aura droit ? Le 14 novembre, soit quinze jours avant qu'Emmanuel Macron prenne la parole, Edouard Philippe avait déjà fait plusieurs gestes en direction des "gilets jaunes". Il promettait notamment une extension du chèque énergie à plus de 5 millions de foyers (contre 3,6 millions auparavant) et une augmentation de la prime à la conversion pour les gros rouleurs et les plus modestes. Des mesures qui figurent dans le PLF.
Quand ? Mardi pourtant, Matignon a soudainement annoncé que ces mesures étaient annulées. De fait, elles devaient compenser la hausse des taxes sur le carburant. Celles-ci étant finalement gelées, il n'y avait plus de raison de les mettre en œuvre…mais cela a suscité tant de colère et d'incompréhension que l'exécutif a annulé l'annulation quelques heures plus tard seulement. Un incroyable cafouillage dont il ne faut retenir qu'une seule chose : oui, le chèque énergie sera bien étendu et augmenté, et oui, la prime à la conversion augmentera en 2019.
La prime exceptionnelle avant le 31 mars
Enfin, le projet de loi présenté mercredi contient la défiscalisation et la désocialisation de la "prime exceptionnelle" de fin d'année qu'Emmanuel Macron avait appelée de ses vœux. Cette prime, de 1.000 euros maximum, pourra être versée par les employeurs jusqu'au 31 mars 2019 aux salariés rémunérés jusqu'à 3.600 euros. Mais aucune obligation ici : le versement ou non de ce coup de pouce dépend du bon vouloir des entreprises.
Pour être adoptés, le PLF et le projet de loi contenant les mesures d'urgence ont encore des étapes à franchir. Le premier, qui revient en seconde lecture au Sénat mercredi, repassera ensuite à l'Assemblée. Le second est examiné par l'Assemblée jeudi avant d'atterrir au Sénat vendredi. Il devra ensuite être réexaminé en cas de désaccord entre les deux chambres.