Environ 98,5% des dépenses réalisées par WN -repreneur l'an dernier de l'usine Whirlpool d'Amiens, aujourd'hui en redressement judiciaire- étaient "directement liées à l'activité de l'entreprise", mais quelque 179.000 euros suscitent "des interrogations", selon les résultats de l'audit rendu public jeudi par Bercy.
En mai 2018, l'industriel picard Nicolas Decayeux avait repris 162 des 282 ex-salariés de Whirlpool. Son entreprise, WN, devait se lancer notamment dans la production de casiers réfrigérés connectés et la fabrication de chargeurs de batteries pour vélos et voitures. L'État avait alors versé 2,5 millions d'euros de subventions et Whirlpool 7,4 millions d'euros. Mais l'entreprise se trouve aujourd'hui dans une impasse de trésorerie, faute de débouchés commerciaux concrets.
Une "demande extrêmement forte de transparence des salariés"
Face à une "demande extrêmement forte de transparence des salariés, qui avaient le sentiment qu'une partie de l'argent avait été mal employé", le ministère de l'Économie avait décidé la semaine dernière de mener un audit sur les comptes de l'entreprise. Cet audit a été mené entre lundi et mercredi par le cabinet KPMG.
"Sur les 12 millions d'euros de recettes" entre juillet 2017 et juin 2019 (dont environ 2 millions de financements bancaires), la très grande majorité, soit 98,5%, ont été utilisés pour des dépenses dont le lien avec l'activité de l'entreprise a pu être justifié", selon le ministère de l'Économie. Dans le détail, 5,3 millions d'euros ont été utilisés pour les salaires, 4,8 millions pour des investissements (machines, propriété intellectuelle...), 1,8 million pour des dépenses d'exploitation (entretien et maintenance, frais bancaires...), le reste se trouvant "sur la trésorerie de l'entreprise".
"Des avantages en nature pour les dirigeants"
Mais quelque 179.000 euros n'ont pas pu être justifiés "sur la durée très brève de l'audit" et "suscitent des interrogations quant à leur montant et leur lien avec l'intérêt social d'une entreprise en création", a poursuivi Bercy, évoquant "des avantages en nature pour les dirigeants", comme des logements, voitures, une loge au stade de foot d'Amiens, "des frais de déplacement" notamment à l'international ou des "frais de représentation".
En outre, si seulement "300.000 euros ont été encaissés par l'entreprise sur toute la période" faute de clients, les dirigeants "ont maintenu le niveau de rémunération" de leurs précédents emplois, y compris lorsque l'entreprise est "entrée dans une très grande difficulté financière", précise Bercy. Bien que légales, ces rémunérations suscitent aussi des "interrogations" particulièrement chez les salariés.
"L'intégralité de l'audit" sera transmise au procureur de la République d'Amiens, qui "appréciera les éventuelles suites à donner à ces informations".