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SAISON 2020 - 2021

En 1869, les eaux de la Méditerranée et de la mer Rouge se rejoigne​nt pour la première fois grâce au percement du canal de Suez. Dans ce nouvel épisode du podcast Europe 1 Studio "Au cœur de l’Histoire", Jean des Cars raconte le projet pharaonique de Ferdinand de Lesseps. 

Le 16 août 1869, la foule vient admirer la rencontre de la mer Rouge et de la Méditerranée. Dans ce nouvel épisode du podcast Europe 1 Studio "Au cœur de l'histoire", Jean des Cars revient sur les négociations compliquées qui ont précédé le percement du canal de Suez.

Le 16 août 1869 est un jour capital pour Ferdinand de Lesseps.  Il n’en a pas dormi de la nuit. C’est le jour où on va lever les barrages et faire se rencontrer, dans le grand Lac Amer, les eaux de la Mer Rouge et celles de la Méditerranée. Au bord du lac, se tient Ismaïl Pacha, Vice-Roi d’Egypte depuis deux ans. On l’appelle le Khédive. Le successeur de Saïd Pacha a continué à s’impliquer dans le projet pharaonique de la construction du Canal de Suez, porté par Ferdinand de Lesseps. Ce jour-là, donc, une foule immense s’est rassemblée au bord du lac, à l’endroit où un barrage retient encore les flots de la Mer Rouge. Un kilomètre en amont, un autre barrage retient celles de la Méditerranée. Il faut d’abord libérer le barrage-sud et laisser la Mer Rouge trouver son niveau avant de rompre le barrage-nord. Ferdinand de Lesseps prononce ces mots :"Trente cinq siècles se sont écoulés depuis que les eaux de la Mer Rouge se sont retirées sur l’ordre de Moïse. En ce jour, sur l’ordre du souverain d’Egypte, elles retrouvent leur lit !"

Le Khédive Ismail lève une écharpe rouge, une brèche est ouverte dans le barrage-sud et la Mer Rouge s’engouffre. Elle déferle vers le barrage-nord. C’est le moment crucial car il n’y a pas d’écluses. Si les ingénieurs se sont trompés dans leurs calculs, et qu’il existe une différence de niveaux entre les deux mers (ce que croyaient les pharaons et Bonaparte), on risque une terrible catastrophe… Mais non ! Le barrage-nord tient le choc de l’afflux des eaux de la Mer Rouge. C’est seulement le lendemain que l’on constatera qu’il ne sert plus à rien. En effet, il sépare inutilement deux lacs d’eau calme et du même niveau. Il n’y a plus qu’à le démonter. Les deux mers se sont rejointes. Lesseps est acclamé, son œuvre est accomplie. Encore quelques mois de travaux pour le creusement et la sécurisation des parois du canal. L’inauguration officielle pourra avoir lieu, comme prévu, le 17 novembre suivant. Mais qui est donc Ferdinand de Lesseps, cet homme qui a réussi à concrétiser un projet insensé auquel peu de gens ont cru au départ ?

Ferdinand de Lesseps, un Consul dans la tradition familiale

Ferdinand de Lesseps est né à Versailles le 19 novembre 1805, dans une famille anoblie par Louis XVI en 1777. Il est issu d’une dynastie de Consuls puisque de père en fils et d’oncle en neveu, tous les Lesseps ont exercé plus ou moins des charges consulaires depuis le milieu du XVIIIe siècle. Un de ses oncles, membre de l’expédition de La Pérouse, était Consul Général de France à Saint-Pétersbourg sous le Premier Empire. En 1801, son père, le comte Mathieu de Lesseps, a épousé en Espagne, à Malaga, Catherine Grivegnée, fille d’un négociant de vins d’origine belge et d’une Espagnole, Dona Anna de Gallegos. La soeur ainée de cette-dernière, Marie-Françoise, a épousé un Ecossais, lui aussi négociant en vins. Ils seront les grands-parents de l’Impératrice Eugénie et de sa sœur, la duchesse d’Albe d’où la parenté entre Eugénie et Ferdinand de Lesseps. Mais la future impératrice est beaucoup plus jeune que lui : Ferdinand a 21 ans de plus qu’Eugénie, sa cousine issue de germain. Après des études à Paris au Collège Henri IV, puis à la Faculté de Droit où il nouera des amitiés durables, Ferdinand va devenir Consul comme son père. D’abord élève-consul à Lisbonne, il passe quelque temps au Ministère des Affaires Etrangères à Paris puis il est nommé vice-consul à Tunis où son père est lui-même consul. Une véritable affaire de famille !

Après Tunis, il est nommé, en 1822, à 27 ans, vice-consul attaché au Consulat Général de France à Alexandrie. Un poste qui l’enchante car depuis l’expédition de Bonaparte, l’Egypte est devenue à la mode. Sous la Restauration, de nombreux demi-solde (d’anciens soldats de l’Empire, qui depuis 1815, percevaient la moitié de leurs traitements) se sont mis au service du Pacha d’Egypte, Méhémet Ali. Il les recrutait pour étoffer son armée. Puis, en Egypte, comme le souligne Ghislain de Diesbach, biographe de Lesseps, après les demi-soldes, suivent les savants qui étudient son passé, les ingénieurs qui s’occupent de son avenir plus quelques aventuriers qui s’occupent d’assurer le leur. L’Egyptomania, née grâce à la France, est une réalité.

L’arrivée de Ferdinand à Alexandrie n’est pas simple : son bateau est mis en quarantaine en raison d’un risque de choléra. Pour le distraire, le Consul de France, Jean-François Missaut, lui fait envoyer à bord des livres de la bibliothèque du Consulat. L’un d’eux va particulièrement retenir l’attention de Ferdinand : c’est le rapport de l’ingénieur Le Père, attaché à l’Expédition de Bonaparte en 1798, qui avait étudié la question du percement de l’isthme de Suez. C’est une révélation. C’est à ce moment que naît chez lui l’idée de reprendre les plans de Le Père mais aussi ceux de ses prédécesseurs et de ses successeurs. Car l’idée d’un canal reliant la Méditerranée à la Mer Rouge est vieille comme le monde. C’est l’un de ces rêves qui reviennent régulièrement au cours de l’histoire, d’autant plus qu’un canal a existé dans l’Antiquité. Il s’appelait le "Canal des Pharaons", il reliait un bras du Nil à la Mer Arabique. Il ne pouvait fonctionner que lors des crues du Nil. Il permettait  à deux trirèmes de naviguer ensemble ou de se croiser. Lesseps est donc plongé dans l’ouvrage de l’ingénieur Le Père, il rêve de ce canal qu’il ne réalisera que trente ans plus tard. 

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Pendant ce temps, les Saint-Simoniens, disciples du comte de Saint-Simon qui forment une communauté autour de Prosper Enfantin, sont aussi arrivés en Egypte. Ce sont les premiers économistes industriels attachés à la réalisation de grands travaux. Ils ont quitté la France car la Monarchie de Juillet se méfie de leurs idées sociales avancées. Ils viennent proposer au Vice-Roi la construction du canal entre la Méditerranée et la Mer Rouge. Le Pacha Méhémet Ali leur refuse cette mission mais il leur confie la construction d’un barrage à… Assouan ! Les travaux débutent en 1834 mais rien ne fonctionne. Les ouvriers désertent en emportant leurs outils et le Pacha se lasse de ces utopistes. Il finira par se passer de leurs services. Lesseps est témoin de ce naufrage. Il en retiendra les leçons lorsqu’il reprendra le projet du canal.

En 1833, il est nommé Consul au Caire. Une promotion. Le Khédive Méhémet Ali remarque les qualités de cavalier de Ferdinand et  lui demande de donner des leçons d’équitation et d’escrime à son fils, Mohamed Saïd, dans le but de faire maigrir ce prince rondouillard… On ne sait si les leçons ont été efficaces… Le prince Saïd restera un peu enrobé. En revanche, il noue une solide amitié avec le diplomate. Elle se révèlera précieuse quelques années plus tard. En 1834, un épidémie de peste ravage l’Egypte. Elle va durer deux ans. Le Consul de France est héroïque, transformant le Consulat en hôpital. Son sang-froid, son énergie et son humanité forcent l’admiration de tous. Il devient Commissaire en chef à la Santé Publique. Ses mérites trouvent un écho à  Paris : il est nommé chevalier de la Légion d’honneur le 29 avril 1836 par le roi Louis-Philippe. 

Ferdinand de Lesseps a 31 ans. Il est sans fortune mais va faire ce qu’on appelle "un beau mariage" : le 21 décembre 1837, à Paris, il épouse Agathe Delamalle qui appartient à une famille d’éminents juristes. Leur union sera très heureuse. Il voudrait emmener son épouse en Egypte mais il est nommé Consul à Rotterdam puis à Malaga en 1840 et à Barcelone en 1842. Là, il se montre un habile médiateur lors de l’insurrection des habitants contre l’armée. Il va protéger et évacuer les civils français et évite aussi la destruction de la ville. Le roi des Français lui exprime sa satisfaction : Lesseps est promu officier de la Légion d’ Honneur. Il a 37 ans.

En 1848, la Révolution chasse la Monarchie de Juillet et la Deuxième République lui succède. Le poète Lamartine, éphémère ministre des Affaires étrangères, nomme Lesseps ambassadeur à Madrid. L’année suivante, Louis-Napoléon Bonaparte, devenu le Prince-Président, nomme son cousin Jérôme à Madrid. Lesseps est alors envoyé comme médiateur à Rome. Ce n’est pas un cadeau : un corps expéditionnaire français, sous le commandement du général Oudinot, a tenté de renverser la République Romaine dirigée par Mazzini. Or, depuis 1848, le pape Pie IX a été chassé du Vatican par la République et donc dépossédé de son pouvoir temporel. Le corps expéditionnaire français vient-il défendre l’Eglise, devançant ainsi une intervention autrichienne de l’empereur François-Joseph ? Ou, au contraire, vient-il aider la jeune République Romaine ? Oudinot ne rêve que de s’emparer de Rome. Lesseps, en bon médiateur, négocie un accord. 

Alors qu’il vient d’obtenir de Mazzini un armistice, il reçoit un télégramme mettant fin à sa mission. Paris demande l’écrasement de la République Romaine. Oudinot donne l’assaut. Quinze jours plus tard, le régime romain est liquidé. Les troupes françaises ne quitteront Rome qu’en 1870. Lesseps a été désavoué. Sa carrière diplomatique semble brisée. Le Prince-Président Louis-Napoléon ne le soutient guère et le Conseil d’Etat juge que Lesseps a désobéi aux instructions reçues. La convention qu’il a signée avec Mazzini  est contraire aux intérêts de la France. Ce jugement sévère n’est assorti d’aucune sanction. Lesseps décide alors, à 43 ans, de se retirer de la vie publique. Il va enfin pouvoir s’occuper de son épouse et de leurs trois garçons dans le beau château de La Chesnaie, en Indre et Loire, qui appartient à sa belle-mère.

De tragiques épreuves familiales

Lesseps va se consacrer un temps à la gestion de cet immense domaine rural et surtout à l’élevage des chevaux. Quelques années plus tard, il réussira le croisement d’étalons arabes offerts par le Vice-Roi d’Egypte avec des juments percheronnes, créant une nouvelle race de chevaux qui intéressera les éleveurs voisins et fournira aussi les armées. Entre temps, Louis-Napoléon Bonaparte dissout l’Assemblée Nationale le 2 décembre 1851 et le plébiscite des 21 et 22 décembre confère de larges pouvoirs au prince, élu pour dix ans. Un an plus tard, la Deuxième République se transforme en Second Empire. En janvier 1853, l’empereur des Français épouse l’Espagnole Eugénie. Mais Lesseps ne peut se rendre au mariage de sa cousine le 29 janvier car il perd sa mère deux jours plus tôt. C’est une année éprouvante pour lui. En juin, son fils aîné, Charles, 13 ans, attrape la scarlatine et la transmet à sa mère Agathe qui en meurt le 13 juillet. Puis, c’est son deuxième fils, également prénommé Ferdinand, âgé de 5 ans, qui succombe aussi à cette fièvre contagieuse le 28 juillet. A 48 ans, le comte de Lesseps est veuf avec deux fils survivants sur les cinq que lui avait donnés son épouse. Il est accablé.

Alors qu’il est juché sur un échafaudage au domaine de La Chênaie, on lui remet un courrier important, expédié d’Egypte. Abbas 1er, le Vice-Roi qui s’était opposé aux réformes modernistes de ses prédécesseurs et avait expulsé tous les conseillers européens, a été assassiné le 13 juillet 1854. L’ancien Consul de France au Caire apprend aussi que c’est le plus jeune fils de Méhémet Ali, Saïd Pacha, qui lui a succédé. Saïd, ce jeune prince que son père trouvait trop gros et à qui il avait donné des leçons d’équitation, est le nouveau Vice-Roi ! Celui-ci se souvient de leur amitié. Ferdinand de Lesseps décide de tout abandonner en France et se rend en Egypte pour féliciter Mohamed Saïd de son avènement. Il emporte avec lui ses études et réflexions sur le projet d’un canal partant de Suez, projet que personne n’avait osé soumettre aux prédécesseurs de Saïd, après l’échec des Saint-Simoniens. A 49 ans, Ferdinand de Lesseps sort de sa retraite pour commencer une nouvelle vie, encore plus remplie que la première !

Le retour en Egypte

Après dix jours de traversée, Lesseps foule à nouveau, le 7 novembre 1855, le sol d’Alexandrie, quitté seize ans plus tôt. Sur le quai, le ministre égyptien de la Marine et d’autres personnalités sont là pour l’accueillir. On le conduit en grand cortège au Pavillon Cerizy, mis à sa disposition par le Khédive qui le reçoit le jour même en son palais. Il s’y rend après avoir revêtu, par déférence, un habit et toutes ses décorations. Ces retrouvailles sont cordiales et même affectueuses. Mohamed Saïd n’a rien oublié des attentions délicates de Ferdinand à son égard alors qu’il était un adolescent malmené par un père exigeant. Un futur collaborateur de Lesseps, le Docteur Aubert-Roche, farouche républicain et détestant les monarchies, dépeindra ainsi Mohamed Saïd :"Je suis encore étonné de l’esprit, du bon sens et de la haute intelligence de cet homme qui nous avait été dépeint sous de si bizarres couleurs… Nous causions pendant des heures, souvent à dîner et après-diner et je puis vous assurer que le Vice-Roi est un homme hors-ligne, et vous savez qu’avec mes idées républicaines, je suis assez méfiant envers l’autorité, quelle qu’elle soit."

Quelques jours plus tard, Mohamed Saïd invite Lesseps à l’accompagner dans le désert où doivent avoir lieu de grandes manœuvres. Une fin d’après-midi, alors que le soleil se couche, le Français parle longuement à Saïd, fait appel au sens de la grandeur du Khédive en lui montrant quelle gloire attendent l’Egypte et son souverain qui ouvrirait cette voie nouvelle appelée à changer la face du globe : le canal entre la Méditerranée et la Mer Rouge. Mohamed Saïd se montre enthousiaste. Il est soucieux d'accroître l’importance de son pays et il veut aussi assurer l’hérédité de son trône pour pouvoir le laisser à son fils. Mais l’Egypte n’est qu’une province de l’Empire Ottoman et dépend de l’autorité du Sultan de Constantinople. Mohamed Saïd est conscient qu’il ne pourra réussir à obtenir l’accord de la Sublime Porte que s’il est appuyé par une grande puissance. Et il ne doute pas que le projet du percement de l’isthme ne soit soutenu par la France de Napoléon III. Après deux heures de discussion, Saïd déclare à Lesseps : "Je suis convaincu. J’accepte votre plan. Nous nous occuperons, dans le reste du voyage, des moyens d’exécution. C’est une affaire entendue, vous pouvez compter sur moi."

Dans les jours qui vont suivre, ils auront de longs entretiens. Les manœuvres dans le désert terminées, Lesseps gagne Le Caire et s’installe au palais des Muçafirs qui abritait l’Institut Français au temps de Bonaparte. Sa chambre est la pièce où l’ingénieur Le Père avait présenté au général Bonaparte son premier rapport sur le percement de l’isthme. Un heureux présage. Lesseps travaille alors avec acharnement et concentration. Au fond d’un palais somptueux, il fait la connaissance de Linant de Bellefonds, fils d’un officier de marine au service de Méhémet Ali, qui avait participé à des opérations scientifiques l’ayant conduit des côtes canadiennes à l’Egypte. Il avait voyagé au Soudan, remonté le Nil pour en trouver les sources mais il avait dû rebrousser chemin devant l’hostilité des populations. Revenu en Egypte, il devient directeur des Travaux Publics. Il passe pour le meilleur connaisseur de l’isthme de Suez. C’est en grande partie sur son rapport que Lesseps a travaillé pour établir le sien. Ils tombent dans les bras l’un de l’autre. C’est ensemble qu’ils construiront le canal. Si Bellefonds est enthousiaste, il n’en est pas de même pour le Consul Général de Grande Bretagne, M. Bruce. Informé du projet, il prend personnellement position contre, allant jusqu’à dire à Mohamed Saïd : "Prenez garde, Altesse, l’alliance de la France et de l’Angleterre ne tient qu’à un  fil et ce fil, vous risquez de le rompre".

Il est exact qu’à cette époque, la France et l’Angleterre sont,  ensemble, alliées de la Turquie contre la Russie dans la terrible guerre de Crimée. Le 30 novembre 1854, Mohamed Saïd remet à Ferdinand de Lesseps le firman de concession, le contrat lui donnant le pouvoir de fonder et de diriger une Compagnie pour le percement de l’isthme de Suez. C’est l’acte de fondation d’une entreprise appelée à devenir une des plus célèbres du globe. Lesseps a enfin le pouvoir de se lancer dans la grande aventure.

 

Ressources bibliographiques : 

Ghislain de Diesbach, Ferdinand de Lesseps (Perrin, 1998)

Jean des Cars, Eugénie, la dernière Impératrice (Grand Prix de la Fondation Napoléon, Perrin, 2000)

Jean des Cars, François-Joseph et Sissi, le devoir et la rébellion (Perrin, 2017)

 

"Au cœur de l’Histoire" est un podcast Europe 1 Studio

Auteur et présentation : Jean des Cars
Production : Timothée Magot
Réalisation : Matthieu Blaise
Diffusion et édition : Clémence Olivier et Salomé Journo 
Graphisme : Karelle Villais