"La part des contrats à durée indéterminée n’avait jamais été aussi élevée dans les embauches"

3:16
  • Copié

Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.

Bonjour Nicolas, vous avez aimé les statistiques sur l’emploi qui ont été publiées cette semaine. Vous voulez dire que vous avez aimé la hausse du chômage ?

Non, bien sûr. Ces chiffres sont mauvais : sur un an, le nombre total de chômeurs (ceux qui n’ont aucun travail ou ceux qui en ont un tout petit peu, ou un peu) ce total a augmenté de 21.000 personnes, 0,6%. En 10 ans, depuis la grande crise économique, le nombre total des chômeurs a augmenté de 2,4 millions de personnes. C’est absolument écrasant !

Alors, qu’est-ce que vous aimez dans ces chiffres ?

Ce qu’ils cachent, ou en tout cas, ce qu’ils ne disent pas. Par exemple, ces chiffres pris globalement ne disent pas que sur un an, les demandeurs d’emploi qui n’ont pas de boulot (le cœur du chômage, les 3,45 millions de personnes sans aucun emploi) ont diminué de 1,2%. C’est ce chiffre-là qui me paraît significatif. Et puis bien sûr, ce que ne disent pas ces chiffres, même pris sur un an, c’est ce qui s’est passé avant.

C’est-à-dire ?

Ce qui s’est passé avant, c’est toute la politique de dégonflage artificiel des statistiques du chômage, qui a été mise en place pendant des années. Ce fut le cas lorsque la droite était au pouvoir : on appelait ça le traitement social du chômage. Plutôt que de laisser les gens dans les allées de Pôle Emploi (à l’époque, l’ANPE), on les mettait en formation. Et puis, c’est devenu une véritable industrie, en particulier sous le quinquennat précédent.

Et on sait pourquoi : François Hollande, quelques mois seulement après son arrivée au pouvoir, avait promis d’inverser en un an la courbe du chômage. Echec, échec année après année jusqu’au moment où, la présidentielle approchant, il s’est mis à utiliser massivement les fameux outils de traitement social du chômage. Et on a mis des centaines de milliers de jeunes dans des emplois aidés. Et on a placés des centaines de milliers de chômeurs en formation longue, ce qui les sortait des stats du chômage.

Et ça, c’est du passé ?

Quasiment, oui. Le gouvernement actuel a mis en place un reflux de ces différentes méthodes d’habillage des chiffres de l’emploi. Le choix général, au lieu d’aller vers un traitement social du chômage, c’est de privilégier le traitement économique de l’emploi. Favoriser le travail. Flexibiliser le social.

Mais on ne le voit pas dans les résultats !

Pour l’instant, c’est vrai. Mais là encore, on peut essayer de voir ce qui se cache derrière ces chiffres, ces statistiques du chômage. L’Urssaf vient ainsi de révéler que jamais les entreprises n’avaient autant embauché avec des contrats longs, c’est-à-dire avec des contrats de plus d’un mois. Et surtout, que la part des contrats à durée indéterminée n’avait jamais été aussi élevée. Près d’un contrat de travail sur deux.

C’est inédit, et c’est bon signe. A la fois parce que ça veut dire que les ordonnances sociales sont en train de faire effet (vous vous souvenez qu’un des objectifs de cette réforme, c’était de réduire chez les patrons la peur d’embaucher, la peur d’être coincé en cas de coup dur. Et puis c’est quand même le signe que, si on propose des contrats longs, c’est que la confiance dans l’avenir immédiat s’améliore.